Situé à 50 km au sud-ouest de Bangui, Bossongo est un village qui, malgré son éloignement, joue un rôle crucial dans l’économie de la République Centrafricaine grâce à la culture et la production de l’huile de palme. Cette activité représente une source de revenus essentielle pour une grande partie de la population locale, qui produit l’huile de manière artisanale depuis plusieurs décennies. Toutefois, ces dernières années, un groupe de jeunes producteurs locaux, avec à leur tête une entreprise baptisée L’Or Rouge, a décidé de moderniser et de diversifier la production en optant pour une approche semi-industrielle.
Une tradition palmier à huile transmise de génération en génération
Le village de Bossongo est traditionnellement connu pour ses palmiers à huile. À perte de vue, les palmiers fruitiers se déploient sur une superficie d’environ 100 m². La récolte des fruits, généralement effectuée à la main, a démarré récemment, et le travail acharné des producteurs est visible dans les champs bien entretenus. Chaque palmier produit en moyenne cinq régimes, et pour obtenir un fût d’huile de palme, environ 200 régimes sont nécessaires.
Chérubin Leondamon, 35 ans, est le coordonnateur de cette initiative portée par une vingtaine de jeunes producteurs locaux. Selon lui, l’entreprise a collecté des fonds pour acheter la plantation et installer une petite usine semi-industrielle, un projet ambitieux pour dynamiser l’économie locale tout en répondant aux besoins croissants du marché de l’huile de palme en Centrafrique.
Le processus de production semi-artisanale : de la récolte à la transformation
Après la récolte des fruits, ces derniers sont acheminés vers l’usine semi-artisanale installée au centre de la plantation. Là, ils sont d’abord dépulpés, puis malaxés et pressés à l’aide de machines fabriquées localement. Bien que la technologie utilisée soit simple, elle reste efficace et adaptée aux moyens du groupe. Noël Bissafio, machiniste du projet, explique que les machines sont principalement fabriquées avec des matériaux récupérés, tels que des fûts, des bidons, des chaînes de motos et des morceaux de bois solides.
Le processus de production comprend plusieurs étapes : après avoir versé les fruits dans un fût avec de l’eau, les producteurs utilisent un malaxeur pour extraire l’huile. Le produit final, une huile rouge caractéristique, est ensuite conditionné et transporté vers les marchés à l’aide de vélos, de pousse-pousse et de motos à trois roues.
Développement du marché local et international : un potentiel de croissance
L’huile de palme de Bossongo est vendue à des prix attractifs pour les consommateurs locaux. Un bidon de 25 litres est commercialisé à 15 000 francs CFA, tandis que le prix au litre est de 1 500 francs CFA. Cependant, les producteurs ont constaté que le prix peut augmenter lorsque l’huile est transportée vers d’autres régions du pays ou à l’international, atteignant jusqu’à 25 000 FCFA en raison des difficultés logistiques et des coûts supplémentaires liés au transport. Certains clients viennent même de pays voisins, comme le Nigeria et le Cameroun, intéressés par la qualité et le prix compétitif de l’huile produite à Bossongo.
Ambitions de croissance : diversification et industrialisation
Malgré ces réussites, les jeunes producteurs rencontrent plusieurs défis. Selon Clarisse, l’une des productrices impliquées, la principale difficulté réside dans le manque d’infrastructures pour étendre leur activité. « Il nous faut plus de plantations et des moyens de transport pour diffuser nos produits partout en Centrafrique et au-delà de nos frontières », explique-t-elle.
L’ambition du groupe est claire : faire évoluer cette production semi-artisanale vers une production industrielle afin de répondre à une demande croissante et d’assurer une source de revenus plus stable et durable pour la communauté. Le passage à une production plus industrielle permettrait non seulement de maximiser les rendements, mais aussi de créer davantage d’emplois locaux et de renforcer la compétitivité des producteurs face aux autres acteurs du marché international.
Une initiative porteuse d’avenir
L’histoire de l’or rouge à Bossongo illustre parfaitement l’engagement de jeunes entrepreneurs locaux à moderniser une tradition et à améliorer les conditions économiques de leur communauté. Grâce à une gestion innovante, une production durable et des prix compétitifs, l’huile de palme de Bossongo commence à se faire une place non seulement sur les marchés locaux, mais aussi à l’international. Si l’entreprise parvient à surmonter ses défis actuels, elle pourrait bien jouer un rôle clé dans l’essor économique de la République Centrafricaine.
Moctar FICOU / VivAfrik