Le riz, aliment de base au Sénégal, est consommé en grande quantité mais possède une faible valeur nutritionnelle, notamment lorsqu’il est blanchi et transformé. Bien qu’il soit une source importante d’énergie, sa consommation fréquente entraîne des carences nutritionnelles, particulièrement chez les populations vulnérables. Pour y remédier, une solution innovante a été mise en place : l’enrichissement du riz local en micronutriments par fortification. Cette approche vise à combattre la malnutrition, souvent qualifiée de « faim cachée », en améliorant la qualité nutritionnelle du riz destiné à la consommation locale.
La fortification du riz local : une réponse aux carences nutritionnelles
Au Sénégal, l’enrichissement du riz local est devenu un moyen stratégique de lutter contre les carences en vitamines et minéraux. Le riz blanc traditionnellement consommé, qui manque de nutriments essentiels, est désormais enrichi par un procédé appelé extrusion, à l’aide de « kernel », un mélange de vitamines, de fer et de zinc. Assane Koffi, directeur général de la société sénégalaise Filière alimentaire (SFA), explique que ce procédé permet d’ajouter des micronutriments au riz, apportant ainsi une valeur nutritionnelle essentielle pour les consommateurs sénégalais.
Le procédé se fait à travers un système de mélange sophistiqué qui allie 1 % de kernel (micronutriments) à 99 % de riz entier. « Cela permet de renforcer les valeurs nutritionnelles du riz et de le rendre plus adapté aux besoins de la population », précise Assane Koffi. La méthode a déjà fait ses preuves dans d’autres pays, où elle est appliquée à d’autres céréales comme le mil ou le blé. Ce système de fortification pourrait ainsi constituer une solution durable à long terme pour pallier la malnutrition dans plusieurs régions du Sénégal.
L’initiative du riz fortifié dans les cantines scolaires en milieu rural
Les carences en micronutriments touchent particulièrement les enfants et les femmes en âge de procréer, deux groupes vulnérables au Sénégal. Afin de répondre à ces besoins, le Programme alimentaire mondial (PAM) a lancé une initiative d’introduction du riz fortifié dans les cantines scolaires des zones rurales. Le projet a démarré en octobre 2024 dans la région de Matam, au nord-est du Sénégal, et pourrait s’étendre à d’autres régions du pays dans les mois à venir.
L’objectif de cette initiative est de garantir aux enfants des repas plus équilibrés et de favoriser leur développement cognitif et physique. Maïmouna Cissé, cheffe du sous-bureau du PAM à Matam, a expliqué que « l’objectif est de promouvoir la production de riz enrichi en nutriments et d’améliorer l’accès des groupes vulnérables, notamment les écoliers, à des aliments plus sains et nutritifs. » Ce projet vise également à éduquer les populations locales aux bonnes pratiques alimentaires et à promouvoir un régime alimentaire équilibré, indispensable pour la santé publique.
Impact sur la santé et l’éducation des enfants
Des recherches récentes menées par le PAM ont révélé que les carences en vitamines sont courantes chez les enfants sénégalais, en particulier chez les enfants d’âge préscolaire (24 mois à 5 ans) et scolaire (5 à 12 ans). Ces carences affectent non seulement la santé des enfants, mais aussi leurs performances scolaires et physiques. Ainsi, l’introduction du riz fortifié dans les cantines scolaires vise à améliorer leur santé globale et à favoriser de meilleurs résultats scolaires. En offrant un riz local enrichi, l’initiative espère également stimuler la production de riz national et rendre les populations rurales moins dépendantes des importations.
Un pas de géant vers la sécurité alimentaire
L’enrichissement du riz local au Sénégal constitue une solution innovante et prometteuse pour améliorer la nutrition de la population et lutter contre les carences en micronutriments. En permettant à des millions de Sénégalais, et notamment aux enfants, d’accéder à une alimentation plus riche sur le plan nutritionnel, cette initiative pourrait jouer un rôle déterminant dans la lutte contre la malnutrition, également appelée « faim cachée ». Si cette approche se développe à l’échelle nationale, elle pourrait transformer le paysage de la sécurité alimentaire au Sénégal.
Moctar FICOU / VivAfrik