En Guinée, un rapport récemment publié met en lumière les graves inégalités qui existent entre les zones minières et non minières en matière de pauvreté et d’accès aux services de base. Selon cette étude menée par Afrobarometer et publiée le 23 décembre 2024, 55% des habitants des zones minières se trouvent en situation de pauvreté sévère, contre 47% dans les zones non minières. Ces disparités soulignent un problème structurel persistant dans la redistribution des richesses, malgré les initiatives mises en place par le gouvernement guinéen ces dernières années.
Le rapport met en évidence que les populations vivant à proximité des sites miniers sont plus touchées par la pauvreté sévère et l’absence d’infrastructures de base, telles que l’accès à l’eau potable, aux soins de santé et à l’électricité. En dépit des efforts du gouvernement, ces zones restent largement sous-développées par rapport aux régions non minières, ce qui soulève des questions sur l’efficacité des politiques publiques visant à promouvoir un développement équitable.
Disparités marquées entre zones minières et non minières
Les résultats de l’enquête menée auprès de 1200 adultes guinéens dans les préfectures du pays révèlent que les conditions de vie des populations minières sont bien plus précaires que celles des communautés vivant dans des régions sans activités extractives. En effet, les habitants des zones minières sont davantage confrontés à des pénuries fréquentes de besoins de première nécessité. Ainsi, 78% d’entre eux rapportent un manque de revenus en espèces à plusieurs reprises ou toujours, contre 64% dans les zones non minières. De même, 52% des riverains des zones minières ont signalé un manque de médicaments ou de soins médicaux, contre 42% dans les autres régions, et 48% manquent d’eau potable, contre 34%.
Les services publics sont également insuffisants dans les zones minières : seulement 31% des habitants de ces régions ont accès à un réseau électrique, comparé à 48% dans les zones non minières. L’accès à l’eau potable est également limité, avec seulement 14% des préfectures minières bénéficiant d’un système d’adduction d’eau, contre 27% dans les zones sans industries extractives.
Redistribution des revenus : un problème majeur
La mauvaise répartition des revenus générés par l’exploitation minière est un facteur majeur expliquant ces inégalités. Bien que des fonds de développement local aient été mis en place depuis 2017 pour allouer 0,5% à 1% des revenus des entreprises minières aux communautés locales, les résultats restent insuffisants. Les entreprises minières ne respectent pas toujours leurs obligations d’investir dans le développement des infrastructures essentielles. De plus, les revenus miniers sont souvent centralisés au niveau national, ce qui limite leur redistribution équitable vers les zones affectées.
Les infrastructures routières dans les préfectures minières sont également insuffisantes, avec seulement 25% de routes goudronnées, pavées ou bétonnées, contre 45% dans les zones non minières. Cela complique davantage l’accès aux services de base et contribue à l’isolement des populations vivant à proximité des mines.
Amélioration partielle, mais défis persistants
Malgré ces défis, certains habitants des zones minières constatent une amélioration de leurs conditions de vie par rapport à l’année précédente. En effet, 30% des résidents des zones minières jugent leurs conditions de vie actuelles « meilleures » ou « bien meilleures » par rapport à celles d’il y a 12 mois, contre 24% pour les habitants des zones non minières. Cette tendance suggère que certaines initiatives gouvernementales ont eu un impact positif, bien que les progrès restent insuffisants pour réduire durablement les inégalités.
Enfin, les Guinéens restent largement insatisfaits des performances du gouvernement en matière de création d’emplois et d’amélioration des conditions de vie des populations pauvres. 88% des répondants jugent les actions de l’exécutif insatisfaisantes sur la création d’emplois, et 84% sur l’amélioration des conditions de vie des plus vulnérables, un sentiment qui touche à la fois les habitants des zones minières et non minières.
La Guinée, un potentiel minier sous-exploité
La Guinée est riche de vastes ressources naturelles, dont plus de 40 milliards de tonnes de bauxite, 20 milliards de tonnes de fer, ainsi que des quantités importantes d’or, de diamants et d’autres minéraux précieux. Pourtant, malgré ces richesses, les populations vivant à proximité des zones minières peinent à voir des bénéfices tangibles de cette exploitation, et les défis liés à la pauvreté et au manque d’infrastructures restent omniprésents.
Moctar FICOU / VivAfrik
