Les accaparements de terres : Un frein au développement économique de l’Afrique, selon le Pr Samir Amin

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Lors d’un symposium organisé à Dakar au Sénégal, le Professeur Samir Amin a dénoncé les effets néfastes des accaparements de terres sur le développement économique de l’Afrique. Selon l’universitaire franco-égyptien, ce phénomène contribue largement à l’entrave du développement économique des pays africains, en particulier en exacerbant les inégalités et en freinant la croissance durable.

Un modèle de développement à bout de souffle

Le Pr Amin a critiqué un modèle de mondialisation qui pénalise les économies dites « petites », en favorisant les grandes puissances et les multinationales au détriment des peuples et des territoires locaux. Il a souligné que la solution pour le développement durable de l’Afrique réside dans un retour à l’agriculture paysanne, soutenue par des réformes foncières profondes et adaptées aux réalités africaines. Ce retour aux pratiques agricoles durables serait un moyen de lutter contre la pauvreté et de stimuler l’économie locale.

Un processus historique d’expropriation

Le professeur Amin a rappelé que, tout au long de l’histoire, le développement capitaliste s’est souvent accompagné de l’expropriation des terres agricoles, en particulier des paysans. Cela a conduit à une migration massive des populations rurales vers les villes ou vers l’étranger, aggravant ainsi les problèmes d’urbanisation et de pauvreté. Il a pointé du doigt les politiques de la Banque mondiale et de l’Union européenne, qui favorisent des modèles de développement qui, selon lui, ne conduisent qu’à une désagrégation de la paysannerie africaine, laissant place à des bidonvilles et à une précarité grandissante.

L’Afrique, eldorado des multinationales agro-industrielles

L’accaparement des terres, phénomène particulièrement visible en Afrique, prend de plus en plus d’ampleur avec l’arrivée des multinationales agro-industrielles. Ces dernières, attirées par la richesse en ressources naturelles du continent et la disponibilité de terres agricoles à bas coût, ont contribué à la concentration des terres au détriment des agriculteurs locaux.

Le rapport de la Land Matrix publié en 2016, intitulé « Land Matrix Analytical Report II : International Land Deals for Agriculture », a révélé que depuis 2000, 422 transactions foncières ont eu lieu en Afrique, représentant ainsi 42% des transactions mondiales dans le secteur agricole. Cela montre à quel point le continent africain est devenu un terrain de conquête pour les intérêts étrangers, avec des conséquences dramatiques pour la souveraineté alimentaire et le développement économique des nations africaines.

Un appel à l’action pour des réformes foncières

Face à cette situation, le Professeur Amin a insisté sur la nécessité de réformes foncières profondes pour garantir un accès équitable à la terre et soutenir un modèle de développement endogène basé sur l’agriculture paysanne. Ce modèle offrirait de réelles opportunités de développement pour les petits agriculteurs africains, tout en protégeant les terres contre les investissements spéculatifs étrangers.

Une lutte pour la souveraineté et le développement

En conclusion, le Pr Amin a souligné que les accaparements de terres représentent un véritable obstacle à la construction d’une Afrique indépendante, prospère et durable. Selon lui, la solution réside dans un retour à des pratiques agricoles respectueuses de l’environnement et la mise en place de politiques foncières qui permettent à l’agriculture paysanne de jouer un rôle central dans le développement du continent. Cela nécessitera une action concertée et un engagement fort des gouvernements africains et des acteurs internationaux pour préserver les terres agricoles au bénéfice des populations locales.

Moctar FICOU / VivAfrik

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