L’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis le 5 novembre 2024, face à Kamala Harris, marque le retour d’un climatosceptique notoire à la Maison Blanche. Ce retour pourrait bouleverser les engagements pris par les États-Unis en matière de lutte contre le changement climatique, et il intervient à un moment crucial : la 29e Conférence des Parties (COP29) sur les changements climatiques s’ouvre dans quelques jours à Bakou, Azerbaïdjan, du 11 au 22 novembre 2024. Cette nouvelle orientation de la politique américaine suscite de vives inquiétudes parmi les défenseurs de l’environnement et les experts climatiques, qui redoutent un retrait du multilatéralisme environnemental au moment où des avancées critiques sont nécessaires.
Un héritage de désengagement climatique à la Maison Blanche
Le mandat précédent de Trump (2016-2020) avait laissé des traces profondes dans la diplomatie climatique internationale. En juin 2017, il avait retiré les États-Unis de l’Accord de Paris, signé par 195 pays lors de la COP21 en 2015, dans le but de limiter le réchauffement planétaire sous les 2 °C, voire à 1,5 °C si possible. Cette décision avait provoqué une onde de choc mondiale, poussant des dirigeants comme Emmanuel Macron et Angela Merkel à intensifier leurs efforts pour préserver l’accord. La Chine, alors premier émetteur mondial de gaz à effet de serre (22 % des émissions mondiales), avait réaffirmé son engagement envers l’Accord de Paris, positionnant Pékin comme un acteur majeur de la lutte climatique.
L’administration de Joe Biden avait tenté de corriger la trajectoire en réintégrant les États-Unis dans l’Accord de Paris dès janvier 2021, et en adoptant des mesures pour réduire les émissions domestiques de gaz à effet de serre. Biden avait aussi engagé des financements importants pour aider les pays en développement à faire face aux impacts du changement climatique. Cependant, avec le retour de Trump, il est fort probable que les États-Unis adoptent de nouvelles politiques moins ambitieuses, voire opposées, ce qui pourrait affaiblir les engagements de financement et les mesures d’atténuation déjà en place.
Un retour qui pourrait saper les efforts climatiques mondiaux avant la COP29
Alors que la COP29 s’apprête à démarrer, ce changement de direction de la part des États-Unis risque de complexifier les négociations internationales. Les pays en développement, particulièrement en Afrique, espèrent obtenir des financements conséquents pour s’adapter aux effets de plus en plus sévères des changements climatiques. Cependant, avec l’incertitude d’un soutien américain, l’obtention de ces fonds est compromise. En effet, le financement pour les initiatives d’adaptation et de résilience repose en grande partie sur les contributions des nations industrialisées, dont les États-Unis sont le deuxième plus grand émetteur de gaz à effet de serre (11 % des émissions mondiales en 2022).
Le rapport récent du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) tire la sonnette d’alarme : à moins d’un « bond en avant » dans les actions climatiques, la planète se dirige vers un réchauffement de 3,1 °C, dépassant de loin l’objectif de 1,5 °C. Un tel réchauffement aurait des conséquences désastreuses, notamment en matière de sécurité alimentaire, de hausse du niveau de la mer, et de multiplication des événements météorologiques extrêmes.
Le positionnement des autres grandes puissances face à l’absence américaine
Avec la réélection de Trump, la question du leadership dans la lutte contre le changement climatique devient plus cruciale que jamais. Les puissances européennes, comme l’Union européenne, pourraient chercher à renforcer leur position en assumant une part plus importante du fardeau climatique mondial. La Chine, en tant que premier émetteur, pourrait également se voir incitée à maintenir ses engagements climatiques pour éviter un isolement diplomatique. Cependant, le retrait des États-Unis de la scène climatique pourrait affaiblir la coopération internationale, car Washington est historiquement un acteur central des accords internationaux.
Un avenir incertain pour les financements et les engagements climatiques internationaux
Le retour de Trump à la Maison Blanche pose de nombreuses interrogations pour les défenseurs du climat, notamment en ce qui concerne le financement des initiatives climatiques pour les pays vulnérables. Lors de la COP29, ces pays espèrent discuter de la mise en œuvre du Fonds pour les pertes et dommages, destiné à soutenir les régions les plus affectées par le réchauffement climatique. Cependant, l’engagement financier des États-Unis reste incertain, et certains experts estiment qu’il pourrait même être compromis.
L’absence de volonté politique et d’ambitions climatiques claires lors de la campagne électorale 2024, aussi bien chez les républicains que chez les démocrates, reflète une baisse d’intérêt pour la question climatique aux États-Unis. Les organisations environnementales craignent que ce désengagement ne se traduise par une attitude plus réticente à la COP29, au moment où la communauté internationale attend des actions décisives et concertées pour répondre à l’urgence climatique.
Quel rôle pour les États-Unis dans un monde en pleine crise climatique ?
Le monde observe avec attention le retour de Donald Trump et ses conséquences potentielles sur la coopération climatique mondiale. Si les États-Unis optent pour un retrait ou une diminution de leur engagement, cela pourrait encourager d’autres pays à adopter une position similaire, ce qui compliquerait davantage l’atteinte des objectifs de l’Accord de Paris. À la veille de la COP29, cette élection renforce l’urgence pour les autres puissances de s’unir et d’affirmer leur rôle pour éviter un relâchement de la coopération climatique mondiale.
Moctar FICOU / VivAfrik