Le chercheur au Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD) et éditeur de la note de conjoncture Osiriz, Patricio Mendez del Villar, a estimé que le retour de l’Inde sur le marché du riz permettra aux pays africains déficitaires d’importer la céréale à faible coût, mais ne représente pas forcément une bonne nouvelle pour les producteurs locaux.
Encouragé par les perspectives d’une récolte abondante, le gouvernement indien a notamment supprimé par décret officiel, mercredi 23 octobre 2024, le prix plancher pour l’exportation de riz blanc non basmati de 490 $, après avoir aboli une taxe de 10 % sur le riz étuvé. Cette nouvelle configuration devrait raviver la compétition sur le marché et conduire les autres opérateurs comme le Pakistan, la Thaïlande et le Vietnam à réduire davantage les tarifs appliqués à l’export, relaté notre confrère de l’Agence Ecofin, Espoir Olodo.
« La reprise des exportations de l’Inde était prévisible. Mais la question était de savoir quand. En tout cas, on savait qu’à partir du moment où le pays annoncerait son retour sur le marché, il y aurait, si ce n’est un effondrement, au moins une baisse significative des prix mondiaux du riz. Et c’est ce qui est en train de se produire. Nous entrons dans une période où à court terme, c’est-à-dire dans les six prochains mois, les prix mondiaux vont être plutôt à la baisse », a prévenu M. Mendez del Villar qui s’est confié à Ecofin.
Dans cette perspective, l’analyste estime que les exploitants locaux en Afrique de l’Ouest devront faire face à l’afflux du riz asiatique beaucoup plus attractif, compte tenu du pouvoir d’achat des populations et qui bénéficie de nombreux avantages.
L’éditeur de la note de conjoncture Osiriz a aussi détaillé qu’« en face du riz local, il y a le riz importé qui arrive dans les villes d’Afrique de l’Ouest par des bateaux toutes les semaines ou tous les mois à un prix très compétitif, avec une qualité relativement constante qui est disponible toute l’année. Cela fait que les marchés urbains sont approvisionnés de manière régulière grâce à cet arrivage de riz. Dans le cas du riz local, il y a au mieux deux récoltes ou en tout cas une récolte principale. Et donc, pour pouvoir approvisionner l’ensemble des marchés en riz local toute l’année, il faudrait avoir des structures de stockage, de conservation, qui soient non seulement en quantité suffisante, mais aussi qui soient performantes sur le plan qualitatif, de manière à ce que le riz soit stocké dans de bonnes conditions ».
Selon l’Agence Ecofin, le récent assouplissement de la politique rizicole de l’Inde intervient dans un contexte où la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a annoncé un nouveau plan d’autosuffisance dans la céréale sur la période 2025-2030 d’un coût prévisionnel de 19 milliards $.
Pour rappel, selon les données du Département américain de l’agriculture (USDA), l’Inde devrait exporter 21 millions de tonnes de riz en 2024/2025, signant un retour à des niveaux datant de 2020/2021 et 2021/2022. Sur les deux dernières campagnes, le volume expédié était inférieur à 18 millions de tonnes, en raison des restrictions.
Moctar FICOU / VivAfrik