La Banque africaine de développement (BAD) mobilisera des financements pour l’action climatique lors de la 28ème Conférence des Nations unies sur les changements climatiques (COP28) qui débutera jeudi 30 novembre et prendra fin mardi 12 décembre 2023 à Dubaï, aux Émirats arabes unis. Dans le même sillage, la BAD amplifiera les appels de l’Afrique en faveur d’engagements solides de la part des pays riches pour répondre aux besoins urgents du continent en matière de lutte contre les changements climatiques.
Selon un communiqué de presse de la BAD, le Groupe de l’institution financière panafricaine, dont la délégation sera conduite par son président, Akinwumi Adesina, lancera et consolidera plusieurs initiatives d’action climatique lors de cette COP28.
La délégation, qui comprend des vice-présidents, des membres de la haute direction et des experts sectoriels, aura pour objectif d’accroître la visibilité de la Banque au sein de la communauté mondiale du changement climatique, et de mobiliser des ressources supplémentaires pour les fonds et les facilités climatiques.
Au cours de la conférence qui durera deux semaines, la Banque fera progresser les partenariats et la mobilisation des ressources pour sa Facilité africaine d’assurance contre les risques climatiques pour l’adaptation (ACRIFA) comme outil essentiel pour lever les milliards nécessaires pour favoriser l’adaptation aux changements climatiques, la résilience et le développement durable au sein du secteur agricole de l’Afrique.
La Banque se joindra également à ses partenaires pour lancer le Consortium mondial pour les systèmes de stockage d’énergie par batterie (Global Battery Energy Storage System Consortium, anglais), une initiative conjointe avec la Fondation Rockefeller, dans laquelle la Banque joue un rôle de premier plan grâce à son initiative d’énergie solaire Desert-to-Power de dix gigawatts. Le Consortium vise à obtenir cinq gigawatts d’engagements d’ici fin 2024 et à mobiliser plus de quatre milliards de dollars pour réduire de manière significative le coût des technologies d’énergie renouvelable, lit-on dans le communiqué de presse.
Qui a relevé qu’au cours de la COP28, la Banque africaine de développement consolidera également les engagements de financement pour son Alliance pour l’infrastructure verte en Afrique (AGIA) de 10 milliards de dollars.
En outre, la Banque tirera parti de la COP28 pour faire progresser l’initiative de Bridgetown, un plan en faveur du climat et du développement, en organisant une session de haut niveau pour plaider en faveur de la canalisation des droits de tirage spéciaux du Fonds monétaire international (FMI) vers les banques multilatérales de développement et annoncer des engagements dans ce sens.
Les réunions annuelles de la Conférence des Parties (COP) constituent l’unique plateforme mondiale permettant aux États de négocier un accord international sur la marche à suivre pour lutter contre les changements climatiques. Ce rassemblement réunit également les principales parties prenantes engagées dans la lutte contre les changements climatiques : les gouvernements, le secteur privé, la jeunesse et la société civile. La conférence de cette année a pour thème « S’unir, agir, délivrer », a-t-on précisé dans le texte officiel.
L’Afrique, qui représente moins de 4 % des émissions mondiales de carbone, cherche à obtenir davantage de financement climatique de la part des pays riches et très polluants, notamment par le biais d’un nouveau fonds « pertes et dommages » qui devrait être créé lors de la COP28 et de taxes carbone sur des secteurs tels que les combustibles fossiles, le transport maritime et l’aviation.
La Banque africaine de développement a rappelé dans son dernier rapport sur les Perspectives économiques en Afrique que le continent a besoin d’au moins 2 800 milliards de dollars jusqu’en 2030 pour mettre en œuvre ses engagements climatiques énoncés dans les objectifs nationaux des pays dans le cadre de l’Accord de Paris de 2015.
Cependant, souligne le document, les flux de financement climatique vers l’Afrique demeurent très faibles, à hauteur de 3 % du financement climatique mondial, et ont tendance à se concentrer sur des opérations à petite échelle, fragmentées et non coordonnées, principalement dans les pays à revenu intermédiaire.
En amont de la réunion mondiale, M. Adesina a appelé à une action audacieuse et transformatrice pour donner la priorité à l’Afrique. « L’architecture mondiale de financement du climat doit être modifiée pour donner la priorité aux besoins de l’Afrique. Au niveau national, nous devons accélérer les actions d’adaptation aux changements climatiques », avait-il déclaré lors de son discours d’ouverture au Sommet africain du climat [tenu en septembre à Nairobi au Kenya].
Le président de la BAD a ajouté que « c’est la raison pour laquelle la Banque africaine de développement s’est engagée à fournir 25 milliards de dollars pour le financement climatique d’ici à 2025. Nous avons également lancé le Programme d’accélération de l’adaptation en Afrique, en collaboration avec le Centre mondial pour l’adaptation, le plus grand programme d’adaptation climatique au monde ».
« L’Afrique a la chance de disposer des plus grandes sources d’énergie renouvelable au monde, qu’il s’agisse d’énergie solaire, hydroélectrique, éolienne ou géothermique, a affirmé M. Adesina. Mais nous ne pouvons pas alimenter l’Afrique en énergie avec du potentiel. Nous devons libérer le plein potentiel de l’Afrique en matière d’énergies renouvelables. C’est pourquoi la Banque africaine de développement met en œuvre l’initiative Desert-to-Power de 20 milliards de dollars, afin d’exploiter la puissance de l’énergie solaire et de fournir de l’électricité à 250 millions de personnes. »
La COP28 présentera le premier bilan mondial qui fournira une évaluation complète des progrès réalisés depuis l’adoption de l’Accord de Paris, en vertu duquel les pays se sont engagés à fixer des objectifs, connus sous le nom de Contributions déterminées au niveau national (CDN), pour contribuer à l’objectif de limitation du réchauffement climatique fixé par l’Accord. Le bilan vise à harmoniser les efforts en matière d’action climatique, notamment les mesures visant à combler les déficits de progression.
Le sommet verra également le lancement de l’initiative Transformation à grande échelle de l’agriculture et des systèmes alimentaires pour le développement économique (Scaling-up Agriculture and Food Systems Transformation for Economic Development) pour l’Afrique et le Moyen-Orient. Ce programme vise à mobiliser au moins dix milliards de dollars pour traiter la question du lien entre le climat et la sécurité alimentaire dans ces deux régions. La Banque contribuera à cette initiative par le biais de son programme phare des Zones spéciales de transformation agro-industrielle, lit-on encore dans le texte.
Les experts africains sont optimistes quant à la capacité de résilience du continent face aux changements climatiques et à l’insécurité alimentaire. Doté d’importantes ressources en énergie solaire, hydroélectrique et géothermique, il a le potentiel de satisfaire ses besoins en énergie renouvelable et de les partager avec d’autres régions.
Des interventions pionnières
Depuis 2011, la Banque a déployé des financements climatiques à hauteur de 23 milliards de dollars, dont 80 % proviennent de ses instruments de financement. Les 20 % restants proviennent de co-financeurs et de bailleurs de fonds externes spécialisés dans le financement climatique, tels que le Fonds pour l’environnement mondial, le Fonds vert pour le climat et les Fonds d’investissement climatiques.
La Banque travaille avec le Centre mondial pour l’adaptation afin de mobiliser 25 milliards de dollars pour intensifier les actions en faveur de la résilience climatique dans le cadre du Programme d’accélération de l’adaptation en Afrique. À ce jour, quatre milliards de dollars ont été levés pour 43 projets dans 36 pays dans les domaines de l’agriculture, des infrastructures résilientes au climat, de l’eau et de l’assainissement durables, de la jeunesse et de l’emploi, ainsi que des financements innovants pour l’adaptation.
Rappelons que lors de la COP27 en novembre 2022, la Banque et ses partenaires du monde entier ont lancé l’Alliance pour l’infrastructure verte en Afrique (AGIA) afin de renforcer la bancabilité des projets d’infrastructure verte et de générer jusqu’à dix milliards de dollars d’opportunités d’investissement pour le secteur privé. La Banque a également lancé diverses initiatives à volets multiples utilisant la technologie pour stimuler la production alimentaire et la nutrition en Afrique. Il s’agit notamment des Zones spéciales de transformation agro-industrielle et des Technologies pour la transformation de l’agriculture africaine (TAAT).
Lors de la COP28, la Banque africaine de développement contribuera à remodeler le discours mondial sur des questions clés telles que la transition énergétique, les solutions fondées sur la nature, le financement de l’adaptation, la réforme des banques multilatérales de développement, les marchés du carbone et les réparations pour pertes et dommages.
Moctar FICOU / VivAfrik