Le « One Forest Summit », un sommet consacré à la protection des forêts tropicales s’est ouvert mercredi 1er mars 2023 à Libreville au Gabon, avec pour objectif de trouver des « solutions concrètes » pour conjuguer gestion durable des forêts tropicales et développement économique des pays forestiers. Plusieurs chefs d’États et de gouvernement sont attendus, notamment le Français Emmanuel Macron, le Congolais Denis Sassou Nguesso, le Gabonais Ali Bongo évidemment, mais aussi l’Angolais João Lourenzo et le Centrafricain Faustin-Archange Touadéra. Au menu, la protection des forêts du bassin du Congo, en Afrique centrale, à cheval sur le Congo-Brazzaville, la République démocratique du Congo (RDC), le Cameroun, la Centrafrique, la Guinée équatoriale et le Gabon.
« Les forêts représentent en potentiel 20 à 30% de la solution au changement climatique qui est d’après moi la plus grande menace qui est devant nous », a déclaré Lee White, ministre des Eaux et forêts du Gabon, lors de la cérémonie d’ouverture de cet événement co-organisé avec la France et baptisé One Forest Summit.
L’idée de cette réunion de haut niveau, confie un des organisateurs, est de commencer les discussions autour de trois facteurs bloquants. Il y a d’abord le manque de connaissance scientifique sur ces forêts. Les spécialistes disent manquer cruellement de marqueurs, de modélisations pour voir l’évolution face aux changements climatiques. Il faut donc financer des programmes scientifiques.
C’est pourquoi, « il est urgent de mobiliser des fonds pour former des jeunes chercheurs qui vont poursuivre les inventaires et faire le suivi dans des sites de référence pour comprendre le fonctionnement des forêts du bassin du Congo »
Autre axe de travail : l’absence, aujourd’hui, d’une chaîne de valeur durable. Si on produit du bois responsable, il faut être sûr de le vendre, explique un diplomate qui a participé aux discussions. Il faut donc des entreprises qui s’engagent à l’acheter alors qu’il sera plus cher, ajoute-t-il.
Enfin, et c’est probablement le sujet le plus sensible : les financements carbones. Les forêts du bassin du Congo sont aujourd’hui celles qui captent le plus de gaz à effet de serre, et les pays veulent monnayer ce rôle. Payer la tonne de CO2 – 3 à 5 dollars – n’a pas de sens, estiment les spécialistes, qui appellent à fixer le prix entre 30 et 50 dollars. Pour la première fois, on se pose la question de la valeur de cette forêt, se réjouit l’un des organisateurs. « Ces forêts primaires, explique de son côté le ministre français de l’Environnement, Christophe Béchu, ne bénéficient que d’une toute petite partie des crédits verts, des crédits carbones, alors qu’elles rendent un service immense ».
« La France va poursuivre et accélérer son effort (…) pour les forêts d’Afrique centrale », a affirmé la secrétaire d’Etat française, Chrysoula Zacharopoulou avant le lancement des conférences et des discussions qui se dérouleront tout au long de la journée.
Cet événement organisé à l’initiative des chefs d’États gabonais et français se tient les mercredi 1er et jeudi 2 mars 2023 avec pour objectif d’améliorer la conservation des forêts dans le monde et de contribuer à la protection du climat et des espèces dans un contexte de dérèglement climatique.
La promotion de « filières plus durables » pour les produits issus du bois ou de l’agroforesterie et la recherche de financements seront notamment au programme du sommet qui entend également promouvoir la coopération scientifique entre les trois grands bassins forestiers mondiaux : la forêt amazonienne, le bassin du Congo et les forêts tropicales d’Asie du Sud-Est.
Cependant, ce One Forest Summit ne convainc pas tout le monde. « On peut en attendre des annonces, mais ce sera toujours que des annonces », a expliqué un militant écologiste présent à Libreville. D’autant plus qu’il y aura des absences de taille : les présidents de RDC, Félix Tshisekedi, et du Brésil, Luiz Inácio Lula da Silva. Leurs deux pays possèdent le plus de forêts tropicales, mais eux n’ont pas prévu de faire le déplacement.
Il ne faut également pas s’attendre à de nouvelles décisions. Les organisateurs ont été clairs : c’est dans la suite de la COP biodiversité à Montréal que s’inscrit cette rencontre.
La jeunesse ne manque pas d’idées
Avant l’ouverture du One Forest Summit, de jeunes Africains et Européens ont tenu, mardi 28 février 2023, le One Youth Forest Summit. Qu’attendent-ils du rendez-vous qui s’ouvre ce mercredi ? Quelle sera leur contribution ?
Paulin Lokonda est étudiant en environnement à Kinshasa. Il est venu faire un plaidoyer en faveur de la réduction de l’utilisation des bois de chauffe dans les villages et inciter à faire planter 1 000 arbres par an. « Si chaque université arrive à planter au moins 1 000 arbres par an, nous serons récompensés de tout ce que nous aurons exploité. Ça sera bénéfique pour la communauté mondiale et africaine. »
Jeune volontaire sur les questions environnementales, Mbake Ndiaye, du Sénégal, participe à un projet agricole et de reboisement. Elle explique. « Il y a le reboisement du côté de la mangrove. Il y a le reboisement du côté de la partie continentale. Pour protéger l’environnement, il y a beaucoup de campagnes de reboisement qui se font. »
Sous des tentes, des étudiants gabonais de l’École nationale des eaux et forêts, exposent une pépinière et des produits cosmétiques et de consommation extraits à partir des arbres. Ils sont réunis dans une association dirigée par Jerry Moundounga, qui développe leur projet. « On aide les concessions forestières à pouvoir disposer de pépinières pour leur permettre, lorsqu’ils font la coupe, de replanter. Aujourd’hui, la solution qui est mise en place, ce sont ces pépinières pour dire « on coupe mais on reboise ». ».
Après leur sommet sur la forêt, les jeunes souhaitent que leurs projets bénéficient de l’assistance technique et du financement des bailleurs de fonds pour leur mise en œuvre.
Les éco-gardes en grève
Les éco-gardes du pays entament ce mercredi une grève illimitée. Acteurs majeurs dans la protection et la gestion des parcs nationaux, ils estiment être mal payés et manquent de moyens pour assurer leurs missions. Et malgré une réunion avec leur direction lundi, aucune solution n’a été trouvée.
Sosthène Ndong Engonga, secrétaire général du Syneg, le Syndicat national des éco-gardes du Gabon, expose au micro de Guillaume Thibault les raisons de leur colère.
Jointe par RFI, la direction de l’ANPN, l’agence nationale des parcs du Gabon indique ne pas être pas favorable à ce mouvement de grève des éco-gardes, et affirme que la régularité du versement des salaires a été améliorée et que la mise en place d’une assurance maladie est en cours.
Moctar FICOU / VivAfrik