Les deux géants d’Afrique du cacao à savoir la Côte d’Ivoire et le Ghana représentent 65 % de la production mondiale de la fève, mais les agriculteurs de ces deux pays gagnent moins de 6 % du revenu total de l’industrie du chocolat, évalué à environ 130 milliards de dollars par an. C’est pourquoi, il n’y aura pas d’officiels ivoiriens et ghanéens ce mercredi 26 octobre 2022 à Bruxelles pour l’ouverture de la rencontre des partenaires de la fondation mondiale du cacao.
En effet, ces pays comptent sur la défense des intérêts des producteurs de cacao. Mieux, Accra et Abidjan protestent contre le fait que les multinationales du secteur refusent toujours d’augmenter une prime versée aux producteurs de cacao. Les ONG, qui plaident pour une amélioration du revenu des agriculteurs, applaudissent cette fermeté des autorités des deux pays.
De nouvelles études ont montré que la part des « cultivateurs de cacao » dans l’ensemble de l’industrie du chocolat a considérablement diminué au fil des ans, car les négociants, les marques et les détaillants ont accumulé des superprofits. Par exemple, selon Fairtrade, lorsque les prix du cacao étaient élevés dans les années 1970, les producteurs de cacao gagnaient jusqu’à 50 % de la valeur d’une barre de chocolat.
Ce boycott est un coup de tonnerre de plus dans un ciel déjà orageux.
Le boycott de la réunion de Bruxelles par les autorités ivoiriennes et ghanéennes traduit le malaise persistant entre les deux géants du cacao et les multinationales du secteur qui refusent d’intégrer une prime permettant d’augmenter le prix d’achat aux planteurs.
Cette politique de la chaise vide est applaudie par les ONG comme la Plateforme ivoirienne pour le cacao durable, qui défend une augmentation du prix de la fève, surtout en cette période de forte inflation.
« Quand vous regardez la production du chocolat, vous avez du lait, du cacao, du lait et du sucre. Le prix du sucre a augmenté, le prix du lait a augmenté, mais le prix du cacao ne fait que baisser. Et pourquoi ? Parce que le sucre et le lait sont produits dans les pays du Nord et qu’il faut aider les agriculteurs du Nord. Mais ceux du Sud, donc de la Côte d’Ivoire et du Ghana, on s’en fout, ce n’est pas notre problème. Non ! Il faut que cela puisse changer. Non seulement c’est injuste, mais en plus c’est à la limite de l’immoralité », s’est félicité Bakary Traoré, directeur exécutif de l’ONG IDEF (Initiatives pour le développement communautaire et la conservation de la forêt), membre de la plateforme.
Les Africains espèrent aussi rallier l’opinion publique européenne. À cet égard, les dirigeants ivoiriens et ghanéens menacent de plus appliquer les programmes de cacao durable mis en œuvre par les industriels du Nord. Programmes que certaines ONG qualifient de greenwashing et d’hypocrisie.
« Ce qui est encore plus décourageant, c’est que le Ghana et la Côte d’Ivoire sont contraints par ces multinationales de vendre leurs fèves de cacao en dessous du prix du marché en vigueur, prix du marché qui lui-même déjà réduit. Elles ont également utilisé des tactiques de marché déloyales, telles que les mécanismes de différentiel d’origine négatif, pour appauvrir davantage les petits producteurs de cacao locaux en leur retirant les primes nationales tout en prétendant payer le différentiel de revenu décent (DRD) introduit il y a environ deux ans », se désolent, dans un communiqué le gouvernement et les régulateurs ivoirien et ghanéen.
La Côte d’Ivoire et le Ghana, deux importants producteurs du Cacao dans le monde, ne participeront pas à la réunion de la World Cocoa Foundation, qui aura lieu à Bruxelles les 26 et 27 octobre 2022, en raison d’un différend sur le différentiel d’origine, ou prime, pour les contrats de la campagne 2023/24, avaient précisé les deux géants d’Afrique de l’Ouest.
Moctar FICOU / VivAfrik