L’Ethiopie annonce la fin du remplissage de la 3ème  phase de son grand barrage sur le Nil

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Les autorités Ethiopiennes ont annoncé, vendredi 12 août 2022, avoir achevé la 3ème phase du remplissage du réservoir de son mégabarrage sur le Nil-Bleu, en dépit des protestations du Soudan et de l’Egypte, inquiets en aval pour leur approvisionnement en eau. Cette annonce n’a fait réagir ni Le Caire ni Khartoum dans l’immédiat.

« Ce que vous voyez derrière moi, c’est le 3ème remplissage terminé », s’est réjoui le Premier ministre Abiy Ahmed dans un discours télévisé depuis le Grand barrage de la Renaissance éthiopienne (GERD), situé dans le nord-ouest du pays et présenté comme le plus grand d’Afrique.

La hauteur de l’eau dans le réservoir atteint désormais 600 mètres, a-t-il précisé. Le réservoir contient désormais 22 milliards de m3 d’eau sur les 74 milliards de sa pleine capacité.

« Le Nil est un cadeau que Dieu nous a offert pour que les Ethiopiens l’utilisent », et « ceux qui n’assument pas les responsabilités qui leur ont été confiées sont critiquables », a poursuivi M. Abiy, répondant implicitement aux critiques du Soudan et de l’Egypte.

Des voisins en colère

Soudan et Égypte ont plusieurs fois demandé à l’Éthiopie de cesser ses opérations de remplissage du GERD, en attendant la conclusion d’un accord tripartite sur ce sujet et sur les modalités de fonctionnement du barrage.

Tributaires du Nil, les deux pays affirment que ce mégabarrage, d’une puissance annoncée de plus de 5 000 mégawatts (MW) à terme et une capacité de retenue de 74 milliards de m3, va nuire à leur approvisionnement en eau.

Fin juillet 2022, l’Égypte avait protesté auprès du Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies (ONU) contre l’intention annoncée de l’Éthiopie de poursuivre « unilatéralement » durant la saison des pluies en cours le remplissage du réservoir entamé en juillet 2020, ce malgré l’absence d’accord entre les trois pays concernés par le sujet.

Abiy Ahmed a toutefois promis que l’Ethiopie n’entendait pas s’accaparer les eaux du Nil et continuerait de veiller à ne pas nuire aux pays en aval.

« Le Nil a été donné gratuitement à trois pays : l’Ethiopie, le Soudan et l’Egypte et ces trois pays ont bénéficié de l’opportunité d’utiliser gratuitement cette eau », a souligné M. Abiy, « si un quelconque pays pense qu’elle ne devrait pas être utilisée, il contrevient aux lois de la Nature ».

« Quand on a entrepris de construire un barrage sur le Nil, nous avons, dès le début, dit que nous ne voulions pas nous approprier le fleuve. Mais nous voulons jouir des bénéfices qui nous reviennent », a affirmé le Premier ministre éthiopien dans un tweet.

« Nous espérons aussi que, tout comme l’Ethiopie, les autres bénéficiaires du Nil, le Soudan et l’Égypte, utiliseront le fleuve, chacun à leur manière (…) nous avons tenu notre parole que le projet ne causerait de tort à personne », a-t-il ajouté.

– « Menace existentielle » –

Lors d’une cérémonie jeudi, M. Abiy avait démarré la deuxième turbine (sur les 13 prévues) du barrage qui doit permettre, quand il fonctionnera à pleine capacité, de doubler la production électrique actuelle de l’Ethiopie.

Pour l’heure, ces deux premières turbines ont une capacité de production totale de 750 MW.

« Le projet dans son ensemble est désormais achevé à 83,3% », et ses travaux de génie civil « à 95% », a indiqué durant la cérémonie Kifle Horo, chef de projet du Gerd.

L’objectif « des deux prochaines années et demie (…) est d’achever totalement le barrage, de procéder à chaque étape du remplissage et d’installer les turbines restantes » afin que le Gerd soit en mesure de produire à pleine capacité, a confirmé M. Kifle.

Situé à une trentaine de kilomètres de la frontière soudanaise, sur le Nil-Bleu qui rejoint le Nil-Blanc à Khartoum pour former le Nil, le barrage est long de 1,8 kilomètre et haut de 145 mètres.

Le coût du projet, lancé en 2011, est estimé à quatre milliards de dollars.

En 2021, l’ONU a recommandé aux trois pays concernés de poursuivre leurs pourparlers entamés sous l’égide de l’Union africaine, et pour l’instant durablement dans l’impasse.

L’Ethiopie estime que le barrage est essentiel à son développement, tandis que l’Egypte le considère comme une menace « existentielle » et que le Soudan a prévenu qu’il faisait peser de « grands risques » sur la vie de millions de personnes. 

Moctar FICOU / VivAfrik

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