L’Organisation des Nations unies (ONU) fait part que le monde n’est pas prêt à faire face aux incendies exceptionnels comme ceux ayant ravagé l’Australie en 2019-2020, des épisodes extrêmes alimentés par le réchauffement climatique dont le nombre devrait augmenter de 50 % d’ici à la fin du siècle (2100).
Suffisant pour l’ONU d’appeler les gouvernements qui ne sont pas préparés à ce scénario à orienter leurs investissements vers la prévention et la préparation pour faire face aux incendies incontrôlés.
De l’Australie à la Californie, et jusqu’en Arctique, les images de feux spectaculaires dévorant forêts et habitations ont fait la Une des médias ces dernières années. Et ce n’est qu’un début, prévient le rapport de l’ONU-Environnement et du Centre GRID-Arendal publié ce mercredi 23 février 2022 à Nairobi au Kenya.
Selon un nouveau rapport du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) et le Centre d’information et de données GRID-Arendal, les changements climatiques et l’évolution de l’utilisation des sols devraient rendre les feux incontrôlés plus fréquents et plus intenses. Les experts prévoient une augmentation mondiale des incendies extrêmes pouvant atteindre 14 % à l’horizon 2030, 30 % d’ici à 2050 et 50 % d’ici à la fin du siècle.
Selon les experts des Nations unies, les incendies, naturels, accidentels ou provoqués, ne sont pas directement causés par le réchauffement de la planète, mais les épisodes de plus en plus fréquents et intenses de sécheresses et de canicules créent des conditions particulièrement propices à leur développement.
A ce propos, estiment les auteurs du rapport, « même en mettant en place les efforts les plus ambitieux pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, la planète subira une hausse dramatique de la fréquence des conditions favorisant les incendies extrêmes ».
Ces chiffres avancés plus haut ne concernent que les incendies les plus exceptionnels, qui en théorie ne se produisent qu’une fois tous les 100 ans et qui se produiraient ainsi un peu plus souvent.
« Ce sont des événements à faible probabilité et cela accroît leur probabilité légèrement », explique l’un des auteurs, Andrew Sullivan, de l’agence australienne CSIRO.
Même si le rapport ne fournit pas d’estimations pour le reste des incendies, « il est probable que les épisodes moins extrêmes augmentent tout autant », a-t-il ajouté lors d’une conférence de presse, notant que la hausse du nombre d’événements pouvait aussi être interprétée comme une extension des surfaces brûlées.
Le rapport, intitulé Spreading like Wildfire : The Rising Threat of Extraordinary Landscape Fires (rapport en anglais, non-traduit), constate que le risque est élevé même dans l’Arctique et dans d’autres régions qui n’étaient pas touchées par les feux non-contrôlés. Il est publié alors que les représentants de 193 nations s’apprêtent à se réunir à Nairobi pour la reprise de la 5ème session de l’Assemblée des Nations unies pour l’environnement (UNEA-5.2), du 28 février au 2 mars 2022.
La publication invite les gouvernements à adopter une nouvelle « formule de préparation aux incendies », selon laquelle deux tiers des dépenses seraient consacrées à la planification, à la prévention, à la préparation et au rétablissement, et un tiers aux interventions. Actuellement, les réponses directes aux incendies de forêt reçoivent généralement plus de la moitié des dépenses correspondantes, tandis que la planification et la prévention reçoivent moins d’1%.
Amélioration de la gestion des « combustibles »
Sans même parler d’une possible aggravation de la situation, les incendies sont déjà un danger pour la vie sur la planète et ses habitants : inhalation de fumée, dégradation des sols et pollution de l’eau, destruction des habitats de nombreuses espèces. Sans oublier l’aggravation du réchauffement climatique en raison de la destruction des forêts, cruciales pour absorber le carbone que nous émettons.
Mais si éliminer le risque d’incendies est impossible, il peut en revanche être réduit, insiste le rapport. En particulier en améliorant la gestion des « combustibles » — tout ce qui peut brûler–, autre variable clé du comportement d’un incendie avec les conditions météo (chaleur et sécheresse qui se multiplient avec le réchauffement) et la topographie.
Mais « la réponse des gouvernements face aux incendies est de mettre de l’argent au mauvais endroit », regrette la patronne de l’ONU-Environnement, Inger Andersen dans un communiqué.
Selon le rapport, les coûts des dommages causés par les feux sont largement plus élevés que les investissements pour les combattre, dont la plus grande part concerne aujourd’hui la réaction aux feux déjà démarrés (pompiers, évacuations).
Un déséquilibre qu’il faut corriger en investissant dans la prévention : réduire les activités pouvant causer des départs de feux, mieux gérer les végétaux morts restés au sol, débroussailler autour des habitations, modifier l’aménagement du territoire…
« Nous devons minimiser les risques d’incendies extrêmes en étant préparés : investir plus dans la réduction des risques, travailler avec les communautés locales, et renforcer les engagements mondiaux contre le changement climatique », a insisté Inger Andersen.
Moctar FICOU / VivAfrik