Par Oliver Griffith
(BFI) – Il y a peu de débats sur le fait que le rythme de la déforestation n’est pas soutenable. La déforestation et la dégradation des forêts sont la deuxième cause du réchauffement climatique, responsable d’environ 15 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. La récente COP26 l’a reconnu et s’est engagée à mettre fin à la déforestation d’ici 2030. Mais comment y arriver ?
Les pays du Nord peuvent-ils dire aux pays en développement de ne pas abattre leurs forêts parce qu’elles serrent comme puits de carbone ? Pas vraiment. Ils ont besoin de croissance économique et ont le droit d’utiliser leurs ressources. Les pays européens ont abattu leurs arbres il y a des siècles pour les mêmes raisons, et les Etats-Unis émettent plus de 15 tonnes métriques de CO2 par habitant, presque huit fois plus que le moyen des pays subsahariens. Ne soyons pas hypocrites.
Pourquoi ne pas simplement acheter les forêts tropicales et les transformer en parcs nationaux pour les préserver comme les poumons du monde ? Ça marche dans certains endroits, mais que se passe-t-il s’il y a des gens qui vivent dans les forêts et contribuent à leur disparition ? L’agriculture de subsistance et la production de charbon à bois représentent environ la moitié de la perte des forêts tropicales, tandis que l’agriculture commerciale et l’exploitation forestière représentent le reste. Donc, la solution est de réduire ces activités.
Etant donné qu’au moins la moitié de la déforestation est liée aux modes de consommation des pays riches, une étape importante consiste à les changer. Il y a des signes encourageants, mais les classes moyennes croissantes dans les pays en développement veulent aussi mieux vivre. Pouvons-nous dire aux gens qui viennent d’échapper à la pauvreté qu’ils ne devraient aspirer d’avoir des voitures ou manger du bœuf ? Changer les habitudes et les modèles économiques qui les soutiennent ne sera pas facile.
La lutte contre la déforestation sur le terrain est un complément indispensable. Cela devrait impliquer de donner aux autochtones des droits fonciers, de créer des programmes de planification familiale pour alléger la pression démographique et de trouver des moyens de subsistance plus durables. Au même temps, les gouvernements doivent réduire les subventions pour les activités forestières non durables et améliorer les lois environnementales et la gestion des forêts.
Étant donné que les principaux moteurs de la déforestation sont économiques, nous devons trouver des solutions économiques. Parmi les plus efficaces est le programme REDD+ des Nations Unies. Il Réduit les Emissions dues à la Déforestation et à la Dégradation des forêts en vendant des crédits de carbone basés sur des réductions d’émissions vérifiées dans les forêts. Les recettes sont utilisées pour aider les communautés forestières à trouver des moyens de subsistance plus durables et d’améliorer leur niveau de vie. En utilisant des mécanismes économiques REDD+ a plus de chance de succès que la plupart des initiatives ayant les mêmes objectifs.
Les résultats obtenus jusqu’à présent sont encourageants. On a constaté que des douzaines de projets REDD+ dans le monde réduisent la déforestation tout en améliorant la vie des habitants des forêts. En outre, REDD+ a sensibilisé les gouvernements et le secteur privé sur l’importance de la préservation des forêts, identifié l’agriculture commerciale comme moteur de la déforestation, et fourni une plateforme pour garantir les droits fonciers. Ce n’est pas une solution miracle et doit être combiné avec l’activisme contre les entreprises polluantes dans les pays du Nord, mais c’est un bon utile.
J’ai récemment visité deux projets REDD+ gérés par Wildlife Works, une société de conservation privée – le Kasigau Corridor Projet au Kenya, qui a été le premier projet REDD+ à être vérifié sous les deux principales normes de REDD+ (VCS, CCBA) en 2011, et l’ERA-Congo Projet dans la province de Mai-Ndombe en République démocratique du Congo (RDC). Ce qui m’a impressionné n’est pas seulement le ralentissement de la déforestation, mais aussi les effets socio-économiques positifs sure ces régions pauvres émanant des fonds de la vente de crédits carbone. Au corridor de Kasigau, où vous tourniez, il y a des projets communautaires comme des écoles et des cliniques, des coopératives d’artisanat, des réservoirs et pompes d’eau, et des coopératives agricoles. En fait, les installations de Wildlife Works sont beaucoup plus visibles que celles des gouvernements locaux ou nationaux.
À Mai-Ndombe, l’impact est encore plus dramatique. Les 180 000 habitants des communautés forestières isolées de la zone du projet de 300 000 hectares manquent à peu près de tout – soins de santé, éducation, électricité, eau courante et nutrition adéquate. Une fois de plus, les projets communautaires de Wildlife Works se répandent rapidement et aident déjà plus de 50 000 personnes, beaucoup plus que les services publics sous-financés. Que cela se produise en RDC et avec le soutien relativement efficace du gouvernement, est encore plus remarquable.
Le temps nous dira si de tels projets sont durables à long terme. Il serait préférable que les gouvernements des pays en développement assument eux-mêmes ces tâches et que les pays riches tiennent enfin leurs promesses de réduire considérablement leurs émissions. Cependant, c’est un vœu pieux donc, compte tenu de l’urgence de la déforestation, nous avons besoin d’alternatives viables telles que REDD+.
Par Oliver Griffith, spécialiste de la communication et de l’économie avec 35 ans d’expérience dans les affaires internationales et la rédaction, en particulier sur l’Afrique – en tant que diplomate américain, fonctionnaire du Groupe de la Banque Mondiale (SFI) et conseiller pour le fonds d’infrastructure Africa50. Il a travaillé au Rwanda et en République centrafricaine comme diplomate et a été responsable du bureau du US State Department pour la Tanzanie, Madagascar, Maurice, les Comores et les Seychelles.