Malgré l’optimisme du porte-parole des négociateurs des pays africains, le Malien Seyni Nafo qui parle d’un bilan « plutôt satisfaisant d’un point de vue réaliste et pragmatique » pour l’Afrique, certains observateurs pointent du doigt les préoccupations « encore » biaisées des pays pauvres au sortir de la 26ème Conférence des Nations unies sur les changements climatiques (COP26).
Deux semaines de négociations à Glasgow, en Écosse, ont amené à un compromis, avec quelques avancées sur la question climatique. Mais les principales revendications portées par les pays les plus touchés par le réchauffement n’ont pas abouti.
La limitation du réchauffement à 1,5⁰C, c’est du moins l’objectif que les pays se sont fixés pour impacter le dérèglement climatique. Les discussions et négociations intenses de la COP26 ont pris fin avec des accords globaux. Certains signataires étaient moins satisfaits que d’autres. Si les mesures votées exhortent les pays à tout faire pour ne pas dépasser la barre de 1,5°C, cet objectif va rester difficile à atteindre.
Mettre la main à la pâte pour « réduire progressivement » l’usage du charbon hors captage de CO2, c’est ce qui a été arrêté dans le texte final de la COP26, alors qu’il était jusque-là question d’en « sortir progressivement ». Une nuance voulue par l’Inde, défenseuse d’un « usage responsable » des énergies fossiles, et acceptée par la Chine et les USA, respectivement plus gros consommateur et producteur mondiaux de combustibles fossiles.
Mieux, « l’accord de Glasgow » adopté samedi 13 novembre 2021 par 200 pays à l’issue d’un marathon de deux semaines de négociations, vise à accélérer la lutte contre le réchauffement climatique. Il est certes adopté, mais modifié à la dernière minute par l’Inde avec le soutien de la Chine.
Dans le texte et précisément à l’article 36, il sera question de réduction progressive du recours au charbon et non d’une sortie de cette énergie fossile tant espérée. Un accord considéré comme imparfait mais comportant tout de même quelques avancées.
Il aura fallu, dans la douleur et à travers des échanges multiples, attendre les dernières heures de la COP26 pour arriver à un accord samedi dernier. Un autre point qui a cristallisé les frustrations est celui de la finance climatique, les pays pauvres n’ayant toujours pas obtenu des dédommagements pour compenser les retombées économiques et environnementales négatives du réchauffement de la planète sur leurs territoires. Pourtant les plus faibles émetteurs de gaz à effet de serre se heurtent aux craintes de possibles implications juridiques par les principaux pollueurs.
Ajouté à cela la permission d’entorses aux résolutions de réduction d’émission en cas de « circonstances nationales particulières », on peut comprendre l’insatisfaction de nombreuses parties, dont entre autres les délégations fidjiennes, maldiviennes, marshallaises, suisse, guinéenne, ainsi que des experts et représentants d’institutions et ONG de divers horizons.
Répondre aux demandes d’aide des pays pauvres
« Actuellement, à 1,2 °C de réchauffement climatique, la sécheresse et les inondations tuent des gens en Ouganda. Seules des réductions d’émissions immédiates et drastiques nous donneront un espoir de sécurité, et les dirigeants mondiaux n’ont pas réussi pour le moment » a affirmé Vanessa Nakate, militante écologique ougandaise, tandis que pour Shauna Aminath, ministre maldivienne de l’Environnement, « les progrès progressifs réalisés à Glasgow ne correspondent pas à l’urgence et à l’échelle requises […] pour nous c’est une question de survie ».
Les conclusions de cet accord peuvent ainsi se résumer aux volets financement, énergies fossiles, compensation et ambition des États.
Quatre mots qui ont focalisé l’attention et les tensions à Glasgow. L’adoption définitive du texte est intervenue après des changements de dernière minute introduits par la Chine et I’Inde sur la question des énergies fossiles, n’assure pas de contenir le réchauffement climatique à 1,5°C ni de répondre aux demandes d’aide des pays pauvres.
Au cours de ces 15 jours d’échanges en terre écossaise, il était attendu que les préoccupations des pays pauvres et faiblement armés pour faire face aux dérèglements climatiques, puissent trouver de possibles réponses. Il faut rappeler qu’il avait été convenu, de porter à partir de 2020 une aide climat au Sud à 100 milliards de dollars par an, pour pays pauvres, qui sont moins responsables du réchauffement et qui, en première ligne font face à ses impacts, raison pour laquelle ils demandaient un financement spécifique des « pertes et préjudices » qu’ils subissent déjà.
Cependant, les pays développés comme les États-Unis, au premier rang, qui redoutent de possibles conséquences juridiques, s’y sont fermement opposés. A contrecœur, les pays pauvres ont cédé, acceptant une poursuite du dialogue afin ne pas perdre les avancées sur la lutte contre le réchauffement, dont les effets les menacent déjà directement. Tout en se disant « extrêmement déçus ».
En définitive, les pays vont rehausser leur engagement pour notamment la limitation des températures. Il faut également signaler que le texte adopté à Glasgow exhorte les États à doubler le financement de l’adaptation d’ici à 2025. Quant au financement spécifique réclamé par les pays émergents pour limiter l’impact du réchauffement climatique, pas d’avancée majeure et pourtant, ils sont les premiers à subir les effets.
Des accords signés sur les secteurs automobile, gazier et forestier
Ceci, pour dire qu’il y a eu quelques points positifs à cette COP26. D’abord un changement de cadence qui enjoint les plus gros acteurs des marchés carbone à présenter dans 1 an à la COP27 des politiques plus concrètes et efficaces pour atteindre les objectifs de l’accord de Paris. Un accord optimisé par l’examen et la modification de certaines règles de fonctionnement du marché. Mieux, les 200 pays participants devront fournir d’ici à 2024 des détails sur leurs émissions, pour servir de référentiel pour les avancées futures.
Des accords ont été signés sur les secteurs automobile, gazier (méthane), forestier, à étudier et implémenter à la COP27. Beaucoup de banques majeures et de pays, dont la France, ont pris l’engagement d’adapter leurs investissements à la neutralité carbone au cours de la décennie. Concernant la finance climat, les pays riches ont réitéré leur engagement à doubler d’ici à 2025 leur soutien financier à l’adaptation climatique des pays du Sud, l’amenant à 100 milliards USD.
Pour l’année prochaine, un autre rendez-vous international se tiendra en Égypte pour réfléchir sur de nouvelles formules en vue de lutter contre le réchauffement climatique. Il est toutefois à espérer que ces pays laissés en rade puissent être soutenus pour faire face à la menace climatique qui progresse.
C’est pourquoi, l’ONU craint toujours le scénario d’un réchauffement de plus de 2,7 °C d’ici à l’an 2100, et pour l’éviter, il faudrait parvenir à réduire les émissions de gaz à effet de serre à l’échelle mondiale, de 45% au plus tard en 2030. Une direction que le monde est pour l’instant, loin de prendre.
Moctar FICOU / VivAfrik