L’agence humanitaire de l’Organisation des Nations unies (ONU) a déclaré, jeudi 30 septembre 2021, peu après l’annonce de l’expulsion de sept responsables onusiens par Addis Abeba qu’une malnutrition « sans précédent » touche, après dix mois de guerre, les femmes enceintes et allaitantes dans la région éthiopienne du Tigré.
Le Bureau des Nations-Unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA) décrit également une malnutrition « alarmante » chez les enfants, alors que grandit le spectre de la famine, a affirmé l’OCHA dans un rapport publié en ligne.
« Sur plus de 15 000 femmes enceintes et allaitantes suivies sur la période d’étude, plus de 12 000, soit environ 79 %, ont été diagnostiquées en malnutrition grave », a affirmé le Bureau de la coordination des affaires humanitaires.
Le niveau de malnutrition modérée parmi les enfants de moins de 5 ans « dépasse également les niveaux d’urgence fixés à 15 %, atteignant environ 18 %, tandis que la proportion d’enfants souffrant de malnutrition sévère atteint 2,4 % », au-dessus du seuil d’alarme de 2 %, souligne le rapport.
Rappelons que, jeudi, le gouvernement éthiopien a annoncé l’expulsion sous 72 heures de sept responsables d’agences de l’ONU accusés d’« ingérence » dans ses affaires internes, dont des membres d’OCHA et de le Fonds des Nations unies pour l’enfance (UNICEF).
Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, s’est dit « choqué », et des diplomates ont affirmé qu’une réunion en urgence du Conseil de sécurité de l’ONU s’est tenue à huis clos vendredi 1er octobre 2021 à la mi-journée.
Le Tigré est en proie aux combats depuis novembre, quand le Premier ministre Abiy Ahmed y a envoyé l’armée éthiopienne pour renverser les autorités régionales issues du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF), qu’il accuse d’avoir orchestré des attaques contre des camps militaires fédéraux.
Le conflit s’est enlisé durant plusieurs mois, avant que les combattants pro-TPLF reprennent le contrôle de la région fin juin et que les troupes gouvernementales s’en retirent largement.
Depuis, les combats ont gagné les régions voisines de l’Afar et de l’Amhara.
Selon l’ONU, 400 000 personnes ont « franchi le seuil de la famine » au Tigré, mais très peu d’aide humanitaire parviennent dans la région.
Dans son rapport, OCHA a affirmé qu’au cours de la semaine qui s’est terminée mardi, 79 camions d’aide ont atteint le Tigré, via l’Afar. « Cela porte à 606 le nombre de camions ayant atteint le Tigré depuis le 12 juillet 2021, soit 11 % des camions nécessaires », précise le texte.
Addis Abeba affirme que les combats menés par le TPLF empêchent l’aide d’arriver, mais un porte-parole du département d’État américain a récemment déclaré que les accès étaient « refusés par le gouvernement éthiopien », une situation qui s’apparente à « un siège ».
L’ONU a pu opérer 17 vols transportant des passagers vers Mekele, la capitale du Tigré, depuis juillet. En revanche, un seul vol a pu être réalisé depuis mi-septembre dans le cadre d’un pont aérien que souhaite mettre en place l’Union européenne, nous renseigne le média « France 24 ».
Moctar FICOU / VivAfrik