Le système de commercialisation du cacao en Côte d’Ivoire a été réformé depuis 10 ans déjà. Chaque saison, le régulateur de la filière définit un prix minimum de vente du cacao en se basant sur les ventes par anticipation.
Très attendu par les cacaoculteurs ivoiriens, le nouveau prix bord-champ pour la grande campagne de cacao a été fixé vendredi 1er octobre 2021 par le Conseil Café-Cacao à 825 FCFA le kilogramme. C’est légèrement en hausse par rapport à la petite campagne entre avril et juin derniers mais en baisse de près de 20% par rapport à l’année dernière.
Fixé à 825 FCFA le kilogramme de fèves de cacao, le prix retombe au niveau de la campagne 2019-2020. Mais pour de nombreux planteurs, il ne permet pas de faire face à l’évolution du coût de la vie. L’inflation est de 2% chaque année et les coûts d’entretien des champs augmentent également. D’autant que le Ghana voisin, lui, maintient son prix équivalent à 1 000 FCFA le kilogramme.
Le nouveau « différentiel de revenu décent » (DRD), une prime versée aux agriculteurs si les cours du cacao baissent, permet déjà de maintenir un prix au-dessus de celui du marché, a expliqué Yves Koné, directeur général du Conseil Café-Cacao. « Cette année, par exemple, le prix moyen du marché c’est 1 132 francs. Avec ça vous ne pouvez même pas donner 700 francs au planteur sans le DRD. Les planteurs ne comprennent pas, peut-être qu’ils ne comprennent pas le mécanisme du prix. Mais je pense que les planteurs en profitent largement », ajoute-t-il.
Si les raisons de cette chute n’ont pas été précisées, il faut l’inscrire toutefois dans un contexte mondial marqué par la faiblesse des prix liée la demande atone en produits chocolatés avec la pandémie de coronavirus et l’excédent sur les marchés.
L’Organisation internationale du cacao (ICCO) estime ainsi à 230 000 tonnes, le surplus de cacao durant la saison cacaoyère 2020/2021, dans son dernier rapport sur les marchés publiés le 14 septembre 2021.
Pour lutter contre l’effondrement du prix du marché, le directeur Ivoirien du Conseil Café-Cacao a également indiqué son désir de voir la production baisser dans le pays – 2,2 millions de tonnes l’année dernière- tout en concédant qu’il est très difficile de contrôler le niveau des récoltes.
L’ouverture de cette campagne est marquée par la perte de confiance entre les organisations de planteurs et le Conseil Café-Cacao, accusé d’être incapable de faire respecter ce prix minimum garanti pour les planteurs.
Du côté des organisations de planteurs, les inquiétudes restent très fortes à l’ouverture de cette campagne. Obed Doua, président de l’APROPACI, l’association des organisations professionnelles agricoles de Côte d’Ivoire, craint que ce prix minimum garanti ne soit pas respecté sur le terrain.
« À un certain moment, dans la période de la campagne, c’est finalement la loi de l’offre et de la demande. Donc les acheteurs nous font du chantage. En plein mois de décembre, où les producteurs ont le plus besoin d’argent, ils font de la rétention du cash », explique-t-il.
Depuis plusieurs mois, les tensions sont importantes entre le Conseil Café-Cacao et les organisations paysannes. Le mécanisme du nouveau « différentiel de revenu décent » est jugé opaque, tandis que les représentants des cacaoculteurs réclament l’organisation d’un « Grenelle du cacao », réunissant tous les acteurs de la filière.
Moctar FICOU / VivAfrik