Une étude publiée mardi 24 août 2021 dans Nature Communications a fait état qu’avec le réchauffement climatique, la montée des eaux, les feux de forêts ou les sécheresses risquent bien de provoquer des mouvements migratoires. Des changements qui ont déjà eu lieu par le passé.
Les scientifiques pensaient jusqu’alors que nos premiers ancêtres humains modernes étaient apparus en Afrique il y a 300 000 ans, et qu’ils l’avaient quittée 60 000 ans avant notre ère pour coloniser les continents voisins. Il semblerait en réalité que d’autres migrations ont finalement eu lieu bien avant. Des groupes d’Homo sapiens se sont aventuré à plusieurs reprises en Eurasie pour fuir des conditions climatiques difficiles sur les territoires dans lesquels ils vivaient auparavant. On retrouve notamment des traces en Arabie Saoudite (datant de 85 000 ans), en Israël (100 000 ans) ou en Grèce (210 000 ans).
Ces indices suggèrent une dispersion d’Homo sapiens hors d’Afrique non pas lors d’un unique périple, mais par vagues successives, sur quelques centaines de milliers d’années. C’est durant ces excursions que les gènes de notre espèce de sont croisés avec d’autres, notamment les Néandertaliens peuplant alors l’Europe. Pour comprendre pourquoi Homo sapiens a dû migrer, les scientifiques ont comparé leurs données avec des estimations de la quantité minimale de pluie requise par ces hommes, des chasseurs-cueilleurs, pour survivre à des changements climatiques extrêmes. Il semblerait que le seuil minimum corresponde à 90 millimètres de précipitations par an.
Leurs résultats permettent d’évaluer les fenêtres d’expansion, où Homo sapiens a mis à profit des conditions météorologiques clémentes pour quitter son berceau africain, à des dizaines de milliers d’années d’intervalles.
Des chemins ouverts en fonction du climat
Deux chemins s’offraient à lui pour gagner la péninsule arabique : par le nord de la mer Rouge (via l’Égypte actuelle puis le Sinaï), ou par le sud, via le détroit de Bal el-Mandeb séparant aujourd’hui Djibouti et le Yémen. La voie du nord s’est ouverte par intermittence, notamment avant la première période interglaciaire, entre -246 000 et -200 000 ans. Les conditions climatiques l’ont rendue ensuite trop aride pour une occupation humaine durable. Elle s’est rouverte de -130 000 ans à -96 000 ans, avant de se refermer à nouveau…
Les opportunités de traverser la mer Rouge par le sud auraient été plus nombreuses – mais en partant du postulat qu’une traversée maritime était faisable. L’étude décrit notamment trois longues périodes combinant climat suffisamment humide et niveau de la mer relativement bas, dont la première se situe entre 275 000 et 242 000 ans. A contrario, de -135 000 à -115 000 ans, le niveau des mers était particulièrement élevé, rendant peu probable une traversée…. tandis que par l’Égypte, une fenêtre s’ouvrait à nouveau.
Les chercheurs concluent que les incursions trop intermittentes d’humains d’Afrique, et la concurrence possible avec d’autres groupes d’hominidés, ont peut-être empêché Homo sapiens de s’installer définitivement en Eurasie à l’époque.
En revanche, la période située entre -65 000 ans et -30 000 ans a bénéficié de conditions climatiques particulièrement favorables, avec un détroit de Bal el-Mandeb alors large de seulement 4 km. Un terrain idéal pour qu’Homo sapiens s’aventure pour de bon hors de l’Afrique et colonise la planète.
Avec AFP