Le Conseil d’État français a condamné le gouvernement à payer une amende de 10 millions d’euros pour son action insuffisante en faveur de l’amélioration de la qualité de l’air le 4 août 2021. Cette décision « historique » obligera la France à réagir dans un délai de 6 mois pour se conformer aux objectifs fixés sous peine d’une nouvelle amende.
En termes clairs, le Conseil d’Etat a jugé insuffisantes les mesures mises en place pour lutter contre la pollution de l’air. C’est pourquoi, l’Etat français devra verser dix millions d’euros à plusieurs associations et des instituts de recherche. Une sanction similaire pourrait être prise avant la fin de l’année si rien ne bouge.
Un an plus tard, les résultats ne sont pas là : « Si des mesures ont été prises, le Conseil d’État estime aujourd’hui qu’elles ne permettront pas d’améliorer la situation dans le délai le plus court possible, car la mise en œuvre de certaines d’entre elles reste incertaine et leurs effets n’ont pas été évalués », a signalé le Conseil d’État.
Qui précise que l’amende de 10 millions d’euros concerne le premier semestre de l’année 2021 et sera reversée aux organismes et associations de lutte contre la pollution de l’air.
Cette décision inédite est le nouvel épisode d’une longue série. Le Conseil d’Etat avait été initialement saisi en juillet 2017 par l’association de protection de l’environnement Les Amis de la Terre. Le Conseil d’Etat avait alors enjoint l’Etat de baisser la concentration de dioxyde d’azote et de particules fines dans treize zones en France, afin de se conformer aux taux fixés par la directive européenne sur la qualité de l’air. En juillet 2020, huit zones n’avaient toujours pas atteint leurs objectifs. Une nouvelle décision donnait alors à l’Etat six mois pour changer la donne, avec une astreinte de 10 millions d’euros par semestre de retard.
Face à des résultats insuffisants en juillet 2020 dans huit zones concernées, le juge administratif a demandé une réponse ferme sous six mois, sous peine d’une amende.
Le Conseil d’État reconnait que le gouvernement a mis en place plusieurs mesures parmi lesquelles le « lancement d’une procédure d’évaluation des politiques publiques en matière de qualité de l’air, l’instauration de nouvelles zones à faible émission (ZFE), des encouragements à la conversion du parc automobile national vers des véhicules moins polluants, l’interdiction progressive des chaudières à gaz ou à fioul…. »
Mais d’après les derniers bilans complets datant de 2019, cinq zones de l’Hexagone ont des concentrations de dioxyde d’azote et de particules fines trop élevées (Paris, Lyon, Toulouse, Grenoble et Marseille-Aix). Des données partielles de 2020 montrent que Paris et Lyon sont toujours concernées par ce dépassement. Pour les trois autres, les taux ne sont que légèrement en-dessous du seuil limite exigé.
Au ministère de la Transition écologique, on tient à souligner que « dès son arrivée, Barbara Pompili a fait de la lutte contre la pollution de l’air une priorité de son action ». Le ministère cite ainsi les zones à faibles émissions, la fin de l’installation de nouvelles chaudières à fioul dans les logements à partir de 2022, le plan feu de bois. « C’est la ministre qui a pris le dossier à bras-le-corps, parce qu’elle mesurait le retard accumulé et la nécessité d’agir vite, dès lors que les politiques de lutte contre la pollution de l’air mettent du temps à produire des résultats », assure son entourage.
La France devra donc payer 10 millions d’euros d’amende pour le premier semestre 2021 (du 11 janvier au 11 juillet). L’argent sera reversé à « plusieurs organismes et associations engagés dans la lutte contre la pollution de l’air pour le surplus », explique l’autorité administrative.
Dans le détail, les dix millions d’euros reversés par l’Etat iront à plusieurs associations de lutte contre la pollution de l’air, dont Les Amis de la Terre. Plusieurs instituts de recherche spécialisés dans la qualité de l’air recevront également des enveloppes de plusieurs millions d’euros. Sont ainsi concernés quatre instituts de recherche. L’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) en est la première bénéficiaire, avec 3,3 millions d’euros. Le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA) touchera 2,5 millions d’euros, et l’Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) 2 millions. Un million d’euros iront également à l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (INERIS).
Moctar FICOU / VivAfrik