Le directeur de la Direction des financements verts et des Partenariats (DFVP), Al Hassane Diop du Ministère de l’Environnement et du Developpement Durable (MEDD) du Sénégal a livré à VivAfrik les ambitions phares du MEDD en termes de création d’emplois verts, l’économie circulaire notamment le recyclage des déchets plastiques et la gestion des forets en général et celle de Mbao en Particulier.
Propos recueillis par Moctar FICOU
Pouvez-vous passer en revue, avec nous, la politique de promotion d’emplois verts au Sénégal ?
Tout d’abord je précise que vous êtes ici à la Direction des financements verts et des Partenariats (DFVP) qui se trouve être le bras technique du ministère de l’Environnement et du Développement durable qui s’occupe de ces questions.
Précisions faites, je commence par vous faire part que nous avons un référentiel des politiques économiques et sociales incarnées par le PSE opérationnalisé par le Plan d’actions Prioritaires ajusté et accéléré (PAP 2A), pour sa seconde phase.
L’axe 2 du PSE parle de capital humain, de protection sociale et de développement durable. C’est dans cet axe que pratiquement toutes les activités qui participent au développement durable sont inscrites. Le Sénégal a manifesté depuis très longtemps sa volonté dans la promotion des emplois verts. Il y a eu beaucoup de conférences à travers lesquelles le président de la République Son Excellence Monsieur, Macky Sall n’a pas caché sa volonté pour la transition vers une économie verte. Ce qui n’est rien d’autre que la mise en place de projets et de programmes qui permettent de matérialiser cette volonté de transition vers une économie verte et donc de financements verts et d’emplois verts.
Les emplois verts sont décents et vertueux avec la prise en compte de la sauvegarde de l’environnement. Ce sont également des emplois soucieux de la préservation de l’environnement et de la lutte contre les effets néfastes des changements climatiques. Cette volonté du Sénégal a été matérialisée par la mise en place, en collaboration avec les partenaires au développement, de projets et de programmes comme le Programme pilote des emplois verts (PPEV) qui a beaucoup accompagné les jeunes porteurs de projets verts, mais aussi le Programme d’appui à la création d’opportunités d’emplois verts (PACEV) dont je suis le coordonnateur et mis en place en collaboration avec Programme des Nations unies pour le Développement (PNUD).
L’une des composantes du PACEV concerne les filières nouvelles qui englobent les activités génératrices de revenus à l’instar des kiosques mobiles solaires. Pour cet exemple, il s’agit de kiosques outillés mis à la disposition des jeunes qui s’activent dans la vente des produits solaires, le rechargement des batteries en zones rurales, ou encore des services de transfert d’argent. Nous avons aussi des triporteurs isothermes qui sont mis à la disposition des Groupements d’intérêt économique (GIE) de femmes qui s’activent autour du maraichage, de l’agroforesterie, de la poissonnerie mais aussi de la charcuterie. Toutes ces activités sont inscrites dans le PACEV et font partie des filières nouvelles. Une autre composante du PACEV concerne les filières classiques mises en place pour des activités comme le recyclage. Ce sont donc les deux composantes sur lesquelles nous nous appuyons pour matérialiser la volonté du chef de l’Etat d’aller vers une transition économique verte, résiliente, et respectueuse de l’environnement à travers les emplois verts.
Quel accompagnement pour toutes ces initiatives ?
Le ministre de l’Environnement et du Développement durable, Abdou Karim Sall, nous a instruit de travailler autour de projets structurants mais aussi autour de la durabilité. Il est bon de créer des emplois, il est bon de mettre en place des mécanismes pour la création d’emplois verts mais aussi il faut s’inscrire dans la durabilité. Il faut des stratégies concrètes pour rendre durable ces emplois, en faire la promotion pour permettre aux jeunes bénéficiaires des activités financées par l’Etat du Sénégal et le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) dans le cadre du PACEV d’inscrire leur activité dans la durabilité.
Le recyclage des déchets plastiques permet de promouvoir l’économie circulaire ? Quelle est sa place dans votre agenda ?
Vous pointez du doigt un sujet d’actualité. Le Sénégal a pris une option irréversible de se départir du plastique. Cette décision constitue le fondement qui pourrait nous aider aujourd’hui à promouvoir des activités de recyclages, c’est-à-dire de transformer les déchets plastiques de façon à les réinjectés dans le circuit de production sous forme de nouveaux « output ».
Monsieur le ministre Abdou Karim Sall a entamé la mise en œuvre de la loi interdisant le pastique, votée par l’Assemblée nationale et promulguée par le Président de la République, en exhortant les équipes du MEDD de travailler avec les entreprises privées qui manifestent leur volonté à exercer dans le recyclage des déchets plastiques.
Parler de ce recyclage-là, c’est parler de l’économie circulaire. L’économie circulaire, par opposition à ce qu’on pourrait appeler l’économie linéaire, est une économie dans laquelle pratiquement, tous les déchets sont recyclés, les déchets ne sont pas gênant car étant réintégrés dans le cycle de production de nouveaux outputs. L’effort de nous débarrasser des déchets plastiques trouve un écho favorable dans les activités que nous menons au niveau du PACEV, car nous avons créé une filière « éco-boutique » qui constituent une chaine de boutiques installées dans certaines communes et qui vendent des produits recyclés. Non seulement vendre des produits recyclés participe à la création d’emplois verts, mais aussi encourage les opérateurs économiques à s’engager davantage dans la promotion des activités de recyclage.
Qu’avez-vous fait pour encourager nos jeunes start-ups qui s’activent dans le recyclage des déchets plastiques ?
Nous avons une mission d’accompagnement, une mission de mobilisation de ressources mais aussi une mission de financement. C’est pourquoi, nous recevons très souvent des demandes d’accompagnement pour financer certaines activités liées aux emplois verts. Je peux citer déjà quelques filières : l’aquaculture, la pisciculture, l’agroforesterie, la gestion des déchets plastiques, le micro-jardinage, entre autres.
En effet, nous avons déjà appuyé beaucoup de GIE et des structures qui exercent dans les activités de recyclage. La difficulté très souvent, c’est qu’il y a un problème d’information et lorsque nous recevons des demandes d’accompagnement, nous étudions le niveau de maturité du projet avec nos services et si le projet atteint un cycle de maturité satisfaisant, en général, nous n’éprouvons aucune difficulté à prendre des dispositions nécessaires pour financer, dans la mesure du possible, les porteurs de projets concernés. Nous l’avons déjà fait dans le passé et nous le ferons encore. La Direction des financements verts et des partenariats est en train de travailler avec beaucoup de structures. La preuve, nous sommes en train d’envisager, sur instruction du ministre de l’Environnement et du Développement durable la création d’un fonds d’appui à la création d’emplois verts après avoir déroulé et clôturé avec succès un projet pilote d’emplois verts.
Nous travaillons actuellement avec certaines banques de la place dans le cadre de notre volonté de mise en place dudit fonds qui pourra financer les GIE, les porteurs de projets. Une note conceptuelle est soumise au Ministre qui la validera certainement sous peu pour qu’on puisse obtenir des accords avec les banques en vue de faciliter le financement des activités portées par les jeunes avec un potentiel tangible de création d’emplois verts.
Quid de la forêt de Mbao et des bruits qui courent sur le supposé projet de dé-classification de cette forêt ?. Qu’en est-il réellement ?
Cette question a été déjà clairement traitée par le ministre de l’Environnement et du Développement durable, Monsieur Abdou Karim Sall qui a clos ce débat en précisant qu’« aucun millimètre carré de la forêt classée de Mbao ne sera déclassé ».
Le ministre de l’Environnement est l’autorité dépositaire du pouvoir de veille et de gestion durable des forêts classées. Ainsi, sa première préoccupation est d’augmenter la superficie des forêts et non le contraire. Faut-il rappeler que les forêts jouent un rôle important dans la séquestration de carbone, et donc participe à contenir le réchauffement de la planète. Nous ne pouvons pas être dans une dynamique de réduction des Gaz à effet de serre par la séquestration de carbone et, dans le même temps, éliminer des forêts. La préservation des forêts a toujours été la volonté du Ministre Abdou Karim SALL, son combat, son discours. Il y a eu peut-être des incompréhensions et une mauvaise interprétation des procédures de la part de gens moins avertis qui ont supposé qu’il s’agissait d’une procédure entamée de déclassement. Quand le Ministre de l’Environnement transmet une demande d’une personne morale ou physique d’occuper une partie de forêt classée au Gouverneur, cela constitue un acte normal qui ne consacre en rien un déclassement. Une procédure de déclassement ne peut être déclenchée que par le Président de la République qui est la seule Autorité habilitée à prendre des décisions et donner des instructions en matière de déclassement de forêt.
Je vous remercie.
A propos de Monsieur Al Hassane Diop :
M. Diop est économiste, spécialiste en Partenariat Public-Privé et ingénieur financier. Il est membre du groupe de réflexion des experts PPP qui travaillent autour des » People First PPPs pour le développement durable » pour le Compte de l’organisation des Nations Unies – Commission pour l’Europe (Genève).
Il était aussi membre du Comité Consultatif, pour le Développement des PPP, de la Banque Ouest Africaine de Développement (Togo) et membre du Comité des experts sectoriels de l’UEMOA.
La CEDEAO lui a décerné un satisfecit après l’animation d’un panel de haut niveau sur le Financement par PPP des projets communautaires au profit des honorables députés de son parlement.
Il intervient au Salon MEDIBAT (Sfax-Tunisie) et au forum Africa PPP (Londres).
Il a été nommé le 04 septembre 2019 à la tête de la Direction des Financements verts et des Partenariats, avec la mission de conduire le Programme d’Appui à la Création d’opportunité d’emplois verts jusqu’à son terme. Il devient aussi le Président du Comité de Pilotage du Partenariat pour l’action en faveur d’une économie verte (PAGE, en anglais) qui regroupe 05 agences des nations unies (BIT, UNITAR, PNUD, ONUDI et PNUE).
Propos recueillis par Moctar FICOU / VivAfrik