La valorisation du Typha sous forme de bio-charbon s’inscrit dans une logique de substitution au charbon de bois et contribue à la lutte contre la déforestation (le bois énergie représente 84% de la consommation énergétique des ménages sénégalais et la Mauritanie consomme au moins 50 000 tonnes de charbon par an). Une expérience menée par le Gret en Mauritanie depuis 2011 a démontré la faisabilité des filières artisanales et industrielles de production de charbon à base de typha. Le charbon typha produit est une alternative économiquement viable et efficace au charbon de bois, tandis que sa production et sa consommation bénéficient d’un bilan carbone neutre, alors que le CO2 émis par la carbonisation du charbon est capté par la plante à croissance rapide. Le typha est par ailleurs moins toxique en particules et monoxyde que le charbon de bois, tandis que sa combustion ne génère ni fumée, ni étincelle. La prolifération du typha dans le bassin du fleuve Sénégal a de nombreux impacts néfastes sur l’environnement, la biodiversité et la population locale qui n’a plus accès au cours d’eau et à ses ressources (élevage, pêche, agriculture, etc.) et connait une recrudescence des maladies liées à l’eau stagnante. A ce jour, aucun programme n’a réussi à endiguer la prolifération de la plante et les objectifs ont glissé de l’éradication au contrôle et à la valorisation. Par ailleurs, la consommation de bois-énergie (charbon de bois ou bois), principalement utilisé pour la cuisson, a des effets dévastateurs sur l’environnement. Au Sénégal comme en Mauritanie, avec respectivement 1,5 et 6 millions de m3 de bois utilisés par an, la déforestation est massive. Face à cette situation, le Gret et ses partenaires l’Institut supérieur d’enseignement technologique de Rosso (ISET) et le Parc National du Diawling (PND) ont travaillé depuis 2011 sur la transformation du typha en biocombustible. La première phase de projet, financée par l’Union européenne et l’Agence de la promotion pour l’accès universel aux services (APAUS), ont permis d’aboutir à un processus de fabrication d’une ressource performante – solide, avec un pouvoir calorifique intéressant et peu de fumée à l’utilisation – et à un coût compétitif par rapport au charbon de bois. Pour ce faire, le typha est coupé, séché, carbonisé puis compressé en briquettes qui peuvent être utilisées pour la cuisine. Un guide technique explique les étapes principales de la production de ce biocombustible artisanal, renseigne tyccao-typha.org.
Historique de la valorisation en biocombustible dans la région du Fleuve Sénégal
Plusieurs unités artisanales de production de ce biocombustible ont été mises en place en Mauritanie (2011-2016) puis au Sénégal (2016-2018) par un transfert de compétences Sud-Sud. Ces unités sont principalement tenues par des coopératives féminines dans des villages à proximité de points d’eau envahis par le typha. La qualité du biocombustible produit est avérée et un écosystème d’entreprises complet a été mis sur pied. Ces unités reçoivent encore un appui du Gret pour assurer la durabilité des installations et renforcer la demande (trop faible due à la méconnaissance du produit). Ces unités artisanales ne permettant pas d’endiguer la prolifération de la plante et de produire un biocombustible à une échelle plus large, l’ISET a réalisé des tests sur une première unité semi-industrielle de production de biocombustible de typha. Le biocombustible produit (à partir de typha et de balle de riz) est normé et de qualité supérieure aux projets précédents. Combiné à un cout de production et une rentabilité acceptables, l’opportunité de marché suscite l’intérêt des entrepreneurs en Mauritanie qui ont visité le démonstrateur. Un guide technique de la production semi-industrielle de ce biocombustible a été produit et est disponible. C’est dans ce contexte que le Gret a souhaité continuer cette expérience, en appuyant un entrepreneur local dans la mise en place et le développement d’une unité semi-industrielle pilote de production de ce biocombustible de typha dans la région de Rosso dans le cadre du programme TyCCAO. Cet entrepreneur sélectionné parmi plusieurs, recevra notamment un appui technique (achat et installation de la ligne de production, formation des techniciens, etc.) et de marketing (étude de marché, ciblage des clients – ménages et petits productifs, développement de marché – sensibilisation promotion, animation, etc.). Cette première usine permettra d’établir la rentabilité et la réplicabilité du modèle pour étendre la production de ce biocombustible à plus large échelle. Une fois cette phase pilote de 3 ans (2018-2021) terminée, le programme capitalisera et tirera les leçons apprises pour une mise à l’échelle par la duplication du modèle et la mise en place d’une filière globale pérenne (acteurs formés été organisés, réglementations adaptées, formation pertinentes existantes, etc.). D’autres combustibles renouvelables et standardisés à base typha non carbonisé pourront être développés et commercialisé vers les secteurs économiques à forts besoins thermiques. Les matières premières utilisées pour produire ce biocombustible sont : e typha, plante invasive à fort impact négatif sur l’environnement et la population locale ; le valoriser permet de mieux contrôler son expansion et de réduire les coûts de coupe ; la balle de riz, qui n’est pas valorisée et généralement jetée. Cela permet de réduire l’utilisation de bois pour la production de charbon et donc de réduire d’autant la déforestation. Le typha est moins toxique en particules et monoxyde de carbone que le charbon de bois et sa combustion génère beaucoup moins de fumée et d’étincelle. Ceci réduira le nombre de maladies respiratoires et oculaires dues à la pollution de l’air intérieur (PAI), informe encore notre source.
Debout avec les arbres : une réponse de foi à la déforestation tropicale
Les indigènes ngäbe du Panama maintiennent une riche tradition orale de mythes de de chants sacrés qui sont principalement centrés sur l’ordre cosmique et notre place en son sein. Un mythe conte sur le conflit entre les chefs, géants de chaque côté de la cordillère tropicale de Talamanca. Ils commencent à lutter, d’un côté et de l’autre de la montagne, chacun portant avec lui son propre climat : le chef côté mer des Caraïbes occasionnant de fortes pluies, le chef du côté océan pacifique portant le soleil. Finalement gagne le chef côté Pacifique, mais il permet au chef du côté caribéen de demeurer dans la cime de la forêt tropicale, transformé en un arbre fort. L’histoire se termine laissant apparaitre la naissance de terribles tempêtes venant de l’autre côté des montagnes si quelqu’un touche accidentellement cet arbre de la forêt profonde. Cette version courte d’un des nombreux myhtes ngäbe où les principaux personnages sont des arbres, des animaux et d’autres entités de forêts. Ces indigènes écoutant dans leur enfance les anciens conter ces histoires, nous font comprendre comme la vision du monde ngäbe génère un grand respect de l’ordre cosmique et des forêts vivantes. Nous pouvons aussi comprendre que les peuples comme les ngäbe soient disposés à donner leur vie pour défendre les forêts et les rivières des interminables menaces de déforestation que provoquent le modèle mondial de consommation. En 2019, chaque six seconde nous avons perdu environ la superficie d’un terrain de football de forêt tropicale dans le monde ; à peu près 12 mile kilomètres carré de forêt naturelle a disparu en une année seulement. Depuis 1990, la déforestation mondiale a fait disparaitre une surface plus grande que l’Afrique du Sud, et deux fois l’état du Texas. Nous savons qu’il ne s’agit pas seulement de pleurer la perte d’arbres; la biodiversité des forêts tropicales contient environ quatre-vingt pour cent des animaux terrestres du monde. Le Panama par exemple, est un des territoires à la biodiversité la plus importante de la planète, surtout dans le respect de la densité de cette biodiversité. Neuf cent soixante-huit espèces d’oiseaux résident dans les forêts tropicales, et dans un kilomètre carré de ces territoires existent plus d’espèces de plantes et d’animaux que dans d’autres zones plus grandes que l’Amazoine. Les statistiques varient, mais on estime que le Panama perd environ un pour cent de sa couverture forestière chaque année, avec pour conséquence la dévastation non seulement écologique mais aussi culturelle, sociale et économique des communautés marginales, spécialement les peuples indigènes, relaye pour sa part cmglobal.org.
Moctar FICOU / VivAfrik