Semaine mondiale de l’allaitement maternel : le témoignage des femmes qui allaitent en reprenant le travail

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La Semaine mondiale de l’allaitement maternel, édition 2020, a pour thème « Soutenir l’allaitement maternel pour une planète en meilleure santé ». Dans cet esprit, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et le Fonds des Nations unies pour l’enfance (UNICEF) appellent les gouvernements à protéger et à promouvoir l’accès des femmes à des conseils qualifiés en matière d’allaitement maternel, qui sont essentiels pour soutenir cette pratique.  

Le respect strict de ces conseils qualifiés engage la responsabilité des femmes qui allaitent en reprenant le travail après leur congé maternel. Elles veulent continuer à allaiter leur bébé, au-delà de leur congé. À l’occasion de la semaine mondiale de l’allaitement maternel de cette année, du 1er au 7 août 2020, cinq femmes ont témoigné tous les obstacles traversés pour tirer leur lait sur leur lieu de travail. Infirmière, juriste, salariée dans le secteur de l’énergie… Certaines ont réussi à imposer leurs droits, quand d’autres ont dû abandonner.

Même si les Françaises sont loin d’être les plus grandes adeptes de la pratique, nombreuses sont celles qui souhaitent suivre les recommandations de l’OMS en allaitant leur enfant jusqu’à ses six mois minimum. Mais comment faire lorsqu’elles doivent reprendre le chemin du travail à la fin de leur congé maternité, soit environ deux mois après leur accouchement ? Si – selon une étude de Slater and Gordon – 30% des femmes allaitantes sèvrent leur bébé lorsqu’elles reprennent le travail, certaines font le choix de continuer à allaiter. La grande majorité d’entre elles, qui ne disposent pas de crèche sur leur lieu d’activité, doivent alors tirer leur lait et le conserver jusqu’à leur retour à la maison.

Un vrai défi en soi, quand on a été habituée à donner le sein. « Je n’arrivais absolument pas à tirer mon lait au tire-lait électrique. J’y arrivais seulement au tire-lait manuel ou à la main, mais pas assez par rapport à la consommation de ma fille pendant mon absence », explique Coralie, fonctionnaire de 28 ans. Pourtant, la jeune maman avait tenté de prendre les devants en s’accoutumant à l’appareil un mois avant la reprise de son poste.

Des conditions compliquées sur le lieu de travail

Il faut dire que, sur place, les conditions sont rarement les mêmes qu’à la maison. Jesta, salariée dans le secteur de l’énergie, se souvient d’avoir dû tirer son lait dans les toilettes de son lieu de travail. Toutes les autres pièces du bureau étant transparentes, sa hiérarchie ne lui a pas trouvé d’autre solution. Une pression pour cette jeune maman, qui ressentait une forme de culpabilité à réquisitionner toutes les deux heures un cabinet de toilette : « J’étais en stress, car j’avais le sentiment que je devais faire vite, que quelqu’un allait vouloir entrer ». Sans réfrigérateur à disposition, l’employée devait chaque jour apporter son sac isotherme et ses blocs de glaçons en transports en commun pour pouvoir conserver son lait. Mais le plus dur pour elle, a été d’accepter des conditions d’hygiène peu réjouissantes. « Heureusement, j’avais ma consultante d’allaitement qui me rassurait sur le fait que le lait maternel a des agents anti-infectieux, antiviraux, anti-fongiques », se souvient-elle.

Jesta est loin d’être la seule à fait cette expérience embarrassante. Sur son blog, LaCafouine raconte la sienne de façon plus crue. Durant toute cette période, la parisienne a dû s’installer dans « les cabinets handicapés, les seuls qui ont un abattant qui [lui] permette de tirer [s]on lait assise. Et les seuls dont le lavabo est à l’intérieur ». Des toilettes très convoitées, selon elle par tous les « faiseurs de caca », comme elle les appelle. « Soit j’ai la pression car [l’un d’entre eux] fait plusieurs tentatives d’accès pendant que j’y suis, et je sens son impatience. Soit il a accompli sa tâche juste avant que j’accomplisse la mienne, et 15 minutes en apnée, c’est dur ! », raconte-t-elle en toute transparence. Sans oublier la gêne du « fameux bruit de ventouse » qui « se produit de façon tout à fait impromptue et ressemble à s’y méprendre à un énorme prout ». Si la blogueuse a choisi l’humour pour décrire cette situation, force est de constater que ces conditions n’encouragent pas les mamans à poursuivre l’allaitement. Et certains milieux professionnels que l’on pourrait croire sensibilisés à cette question, ne font pas exception.

La seule fois où je me suis installée dans une salle de réunion, mon responsable n’a pas hésité à toquer violemment à la porte. Il avait une réunion, j’ai dû sortir… J’en garde un très mauvais souvenir.

Infirmière en réanimation exerçant à l’hôpital, Perrine n’a contre toute attente pas pu bénéficier d’un local digne de ce nom pour tirer son lait pendant ses horaires de travail. Elle fut contrainte d’utiliser la salle de repos, obligeant régulièrement ses douze collègues à déserter les lieux. Mais le plus dur pour elle a été de devoir supporter « les bruits des répétiteurs, écrans faisant apparaître les paramètres vitaux de tous les patients et sonnant en cas de problème ». Un énorme stress qui s’ajoutait à celui de devoir tirer son lait sous une blouse sale, « pyjama vert qui prend toutes sortes de miasmes des patients, crachats, sang, urine… ». Lorsqu’elle osait aborder le sujet avec ses supérieurs, Perrine recevait toujours le même retour : « Vous faites de la réanimation… En cas d’urgence, comment comptez-vous procéder ? ». « Le problème est connu et ne fait pas partie des priorités de l’hôpital public », regrette l’infirmière qui a abandonné l’allaitement deux semaines après sa reprise du travail.

Moctar FICOU / VivAfrik

Avec xibar.net     

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