Les études sur l’aménagement du territoire en Afrique ont fait état de l’absence de véritables politiques dans ce domaine. C’est-à-dire, des politiques issues d’un diagnostic rigoureux du comportement des différents secteurs de l’économie et de leurs rapports avec l’espace, et débouchant sur un plan qui repose sur une véritable vision d’avenir assorti d’un projet de société exécuté selon une périodicité définie. Le Sénégal ne fait pas exception à ce constat, mais a néanmoins une tradition pluri-décennale de planification dans le domaine de l’aménagement du territoire.
Dès 1967 est élaborée l’esquisse du Plan National d’Aménagement du Territoire (PNAT) horizon 1995, suivi en 1968 par le premier schéma d’aménagement pour le même horizon. Depuis lors, se sont succédés schémas et plans dont l’actuel Plan national d’aménagement et de développement territorial (PNADT) qui vise l’horizon 2040. Son objectif global étant de promouvoir le développement du Sénégal à partir de ses territoires par une bonne structuration de l’espace et une valorisation durables de ses ressources et potentialités.
Les outils phares de la gouvernance territoriale au Sénégal
Ces outils distinguent les plans de développement qui définissent les axes stratégiques du développement socio économique local et les schémas d’aménagement qui donnent les orientations stratégiques de l’aménagement du territoire local. Ils sont normalement élaborés en référence au Plan Sénégal émergent (PSE), au PNADT et autres plan sous-jacents. Ils intègrent également les orientations de différentes lettres de politique sectorielle de l’Etat du Sénégal. Ci-après une brève mise en cohérence des outils prévus par la Loi d’orientation d’aménagement et de développement territorial (LOADT).
- Le Plan national d’aménagement et de développement territorial (PNADT)
- Le schéma directeur d’aménagement et de développement territorial (SDADT) qui permet de valoriser des zones spécifiques, caractérisé par leur forte potentialités économiques, leur faible niveau de développement encore leurs sensibilité écologique ; voir LOADT
- Le schéma départemental d’aménagement du territoire (SDAT) organise le développement du département en tenant compte des orientations d’aménagement à long terme du territoire national défini dans le PNADT ; Loi n° 2013-10 du 28 décembre 2013 portant Code général des collectivités locales
- Le plan directeur d’urbanisme (PDU) planifie et organise l’occupation du sol dans l’espace urbain ; Loi n°2008-43 du 20 Aout 2008 portant Code de l’Urbanisme
- Le plan d’urbanisme de détail (PUD) qui selon le code de l’urbanisme précise et complète les dispositions des plans directeurs et schémas d’urbanisme en fonction des spécificités de chaque secteur concerné notamment la délimitation des zones d’affectation en considération de la nature et valeur des sols, des règles d’utilisation du sol et de l’équilibre écologique ; Loi N°2008-43 du 20 aout 2008 portant Code de l’Urbanisme
- Le Schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme (SDAU) fixant les orientations fondamentales de l’aménagement des territoires concernés, compte tenu des relations entre ces territoires et les régions avoisinantes et de l’équilibre qu’il convient de préserver entre l’extension des agglomérations, l’exercice des activités agricoles, des activités industrielles et les autres activités économique et la préservation de l’environnement ; Loi N°2008-43 du 20 aout 2008 portant Code de l’Urbanisme
- Le Schéma d’aménagement et de gestion du terroir communautaire (SAGTC) qui s’occupe d’aménager les terroirs communautaires, élaboré en conformité avec le SDADT ; voir LOADT
- Le Schéma de cohérence territoriale (SCOT) met en cohérence les interventions et favorise une cohérence d’ensemble de l’action territoriale ; voir LOADT
- Le plan de développement départemental (PDD) détermine les enjeux et objectifs du développement de la commune et identifie les projets à réaliser durant la période du plan ; loi n° 2013-10 du 28 décembre 2013 portant Code général des collectivités locales
- Le Plan de développement communal (PDC) détermine les enjeux et les objectifs de développement de la commune et identifie les projets à réaliser durant la période du plan ; loi n° 2013-10 du 28 décembre 2013 portant Code général des collectivités locales
Le rêve inaccessible
Les actions concrètes en aménagement du territoire sont limitées et/ou inefficientes. Entre autres raisons de ces difficultés, nous noterons l’insuffisance des moyens techniques et financiers alloués à son fonctionnement, l’instabilité institutionnelle, la domination de l’approche projet etc, comme pour dire que l’aménagement du territoire, malgré les instruments mis à sa disposition n’a pas l’autonomie nécessaire et semble ne pas finalement avoir les moyens de ses ambitions. Ceci nous conforte dans l’idée que l’aménagement du territoire au Sénégal est un aménagement de « théorie ».
L’aménagement du territoire de « théorie », traduit le manque de volonté politique en vue d’une meilleure organisation de l’espace national, objet même de l’aménagement. La cohérence des contenus, l’éloquence et la pertinence des textes et travaux sur l’aménagement sont sans commune mesure avec les réalités du terrain qui paraissent statiques voire régressives. De l’avis de certains acteurs de l’aménagement, les plans malheureusement servent le plus souvent à garnir les tiroirs, ou de documentation qu’à être exécutés et servir de documents de références pour les politiques de développement. C’est comme si l’infrastructuration cohérente des besoins, des desseins, des logiques et contraintes spatiales des acteurs… est un rêve inaccessible.
Mame Diaara Samb / VivAfrik