La France se retire du financement de la NASAN au détriment de l’Afrique

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La Nouvelle alliance pour la sécurité alimentaire et la nutrition (Nasan) vient de perdre un soutien de taille. En effet, la France, lors du remaniement de sa stratégie d’aide publique au développement a décidé, le 8 février 2018 de retirer son soutien à la Nasan.

Le retrait de la France

La Nouvelle alliance est initiée par les pays du G7 et financée en partie par l’Union européenne (Ue) avait pour objectif de faciliter le développement de partenariat publics-privés en Afrique afin de booster la productivité agricole. Responsable de la mise en œuvre du programme au Burkina Faso, la France a finalement décidé de retirer son soutien à l’initiative. En France, c’est une étude réalisée par le centre de recherche agronomique pour le développement (Cirad) sur les résultats des projets Nasan au Burkina Faso et plus spécifiquement le pôle de croissance de Bagré qui a poussé le gouvernement à se désengager. « Le pôle de croissance de Bagré avait par exemple prévu un projet d’irrigation qui a mené à l’éviction des petits paysans de la zone et provoqué des cas d’accaparement des terres assez évidents », explique  Bertrand Noiret d’Oxfam France.  « Le fait que la France se retire seule ne remet pas en cause l’existence même de la Nasan. Il faut maintenant que la France pousse les autres contributeurs à quitter l’alliance. »

Nasan sur la sellette

Une décision pour l’instant isolée, puisque le reste des partenaires n’ont pour l’instant pas annoncé leur intention d’embrayer. Mais la Nouvelle Alliance pour la sécurité alimentaire et la nutrition est sur la sellette. « Ce retrait de la France devrait être pris en compte par les autres partenaires de la Nasan, tels que l’Union européenne et les États africains. L’Allemagne, autre contributeur majeur de la Nasan, doit également annoncer son retrait », ont déclaré les ONG qui appellent au retrait. Le Royaume-Uni, autre pays contributeur n’a pas refinancé le projet depuis fin 2016. « Mais sans qu’il y ait eu d’annonce officielle de retrait », explique Bertrand Noiret.

Un modèle d’agriculture intensive en Afrique

La Nouvelle alliance pour la sécurité alimentaire et la nutrition continue néanmoins de bénéficier de l’aide de l’Allemagne et de l’Ue. Par le biais la transformation du modèle agricole, la Nasan espérait permettre l’amélioration de la sécurité alimentaire sur le continent, encore fortement touché par la malnutrition mais aussi sortir 50 millions de personnes de la pauvreté d’ici à 2022.

Elle rassemble les pays donateurs parmi eux, dix pays africains tels que le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, l’Ethiopie, le Ghana, le Mozambique, la Tanzanie, le Bénin, le Malawi, le Nigéria et le Sénégal et des grandes firmes de l’agrobusiness à savoir Cargill, Monsanto ou Louis Dreyfus. Le but de la Nasan était de mettre en œuvre un modèle d’agriculture intensive en Afrique. Mais depuis sa création, la nouvelle alliance s’est attirée les critiques les plus acerbes.

La société civile estime que les projets de la Nasan sont davantage profilés pour le bénéfice des grands semenciers que pour celui des petites exploitations familiales qui constituent la vaste majorité du tissu agricole africain. Dans le dernier bilan d’étape réalisé fin 2016 par plusieurs ONG, la balance des bénéfices obtenus par la mise en œuvre de la Nouvelle alliance pour la sécurité alimentaire et la nutrition semblaient en effet clairement pencher en faveur des investisseurs privés.

Le Parlement européen s’oppose au colonialisme agricole en Afrique

Les eurodéputés réclament un changement radical de cap pour la Nouvelle alliance pour la sécurité alimentaire et la nutrition qui tend à répliquer le modèle d’agriculture intensive dans les pays africains. En effet, depuis 2012, les dix pays partenaires avaient mis en œuvre 92% de leurs 210 engagements de modifications législative ou réglementaire, relève le rapport.

À l’inverse, selon les dernières données disponibles datant de 2015,  seuls 18% des projets annoncés au Bénin et 22% des projets annoncés en Côte d’Ivoire avaient été déclarés mis en œuvre. « La Nouvelle alliance pour la sécurité alimentaire et la nutrition (Nasan) a engendré des conséquences catastrophiques pour les communautés locales impactées, et aggravé l’insécurité alimentaire et nutritionnelle des plus pauvres », a rappelé l’ONG Oxfam dans un communiqué.  En Allemagne, les ONG appellent également à un désengagement de l’État fédéral, tandis qu’au niveau européen c’est le Parlement qui a tiré la sonnette d’alarme dès 2016, pour l’instant en vain.

Moctar FICOU / VivAfrik

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