Les recommandations du RPCA/Sahel et Afrique de l’Ouest

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La fin de la 33ème édition de la réunion annuelle du Réseau de prévention et de gestion des crises alimentaires (Rpca) en Afrique de l’ouest et dans la zone Sahel (4 au 6 décembre 2017) est sanctionnée par d’importantes recommandations visant à vaincre la faim et la malnutrition dans la région. L’édition 2018 étant prévue du 3 au 5 décembre à Banjul en Gambie selon Seyni Hamadou, le directeur de l’Agriculture/Uemoa a tenu à rendre publique les recommandations issues de Cotonou, la capitale béninoise. Voici l’intégralité de ces recommandations compilées dans un relevé de conclusions.

Relevé des conclusions de la 33ème réunion annuelle du Rpca

1- Accueillie par la République du Bénin et sous le haut patronage des Commissions de la CEDEAO et de l’UEMOA, la 33e réunion annuelle du Réseau a réuni près de 300 participants, représentants de gouvernements sahéliens et ouest-africains, parlementaires et élus locaux, organisations intergouvernementales (OIG), de la société civile et du secteur privé, partenaires techniques et financiers, médias, etc. Elle a examiné les résultats de la campagne agropastorale 2017-18 et analysé la situation alimentaire et nutritionnelle. Les participants ont eu l’occasion de débattre et d’échanger leurs expériences sur les approches innovantes et territoriales de la sécurité alimentaire et nutritionnelle. Ils ont également fait le point sur la mise en œuvre, les enseignements et les bonnes pratiques de l’Alliance globale pour la résilience (AGIR), la deuxième évaluation externe de la Charte pour la prévention et la gestion des crises alimentaires (Charte PREGEC) et la mise en œuvre de la stratégie de communication du RPCA.

2- La campagne agropastorale a été mitigée, marquée notamment par une fin de saison pluvieuse difficile, lourde de conséquences pour les cultures, le fourrage et les disponibilités en eau pour le bétail. La production céréalière globale est estimée à 68.3 millions de tonnes, supérieure de 4 % à celle de la dernière campagne et de 13 % à la moyenne quinquennale. Cependant, des baisses sensibles sont observées dans plusieurs pays par rapport à la moyenne des cinq dernières campagnes, notamment au Cabo Verde ; la situation critique dans ce pays mérite une attention particulière. L’alimentation du bétail est préoccupante en Mauritanie, au Sénégal, au Mali, au Burkina Faso, au Niger et au Tchad, où une soudure pastorale précoce et très difficile est attendue.

3- Au regard de la situation alimentaire et nutritionnelle, 5.2 millions de personnes sont en besoin d’assistance alimentaire. Ce chiffre pourrait atteindre 9.6 millions de personnes d’ici la soudure en juin-août 2018, si des mesures appropriées ne sont pas prises, en particulier pour faire face à la crise pastorale qui se profile. Même si la situation s’est relativement améliorée dans le bassin du lac Tchad, l’urgence alimentaire y prévaut toujours. La prévalence de la malnutrition aigüe globale dépasse le seuil d’urgence de 15% dans certaines régions de la Mauritanie, du Mali, du Tchad et du nord-est du Nigéria. La situation pourrait s’aggraver du fait de l’inflation et de ses conséquences sur l’accès alimentaire ; en particulier au Ghana, au Libéria et Nigéria dont les monnaies ont été dépréciées.

4- Dans ce contexte, les membres du Réseau recommandent :

1) le maintien de la veille et de l’effort d’assistance alimentaire et nutritionnelle aux populations affectées dans la zone du bassin du lac Tchad, y compris des actions structurantes de réhabilitation ;

2) l’organisation, au plus tard en février 2018, d’une concertation régionale sur la soudure pastorale et agropastorale afin d’évaluer l’ampleur de la crise pastorale et de définir des plans de réponse appropriés, y compris l’accélération de la mise en œuvre de la composante ‘aliment-bétail’ de la réserve régionale de sécurité alimentaire et la préparation du départ anticipé des animaux pour la transhumance transfrontalière ;

3) l’accélération de la vulgarisation des instruments d’évaluation des ressources pastorales et le renforcement des indicateurs de vulnérabilité pastorale dans les analyses du Cadre harmonisé ;

4) l’investissement des gouvernements dans l’élaboration, la mise en œuvre et le suivi-évaluation des plans de réponse ;

5) le renforcement des mesures de prévention et de gestion des maladies ravageuses des plantes, en particulier la chenille légionnaire. Au regard de la situation alimentaire et nutritionnelle critique au Cabo Verde (Cap-Vert), le Réseau appelle la communauté internationale à soutenir les efforts déployés par le pays dans la mise en œuvre de son plan de réponse.

5- Les participants recommandent aux gouvernements et à leurs partenaires de soutenir la mise en œuvre d’une gouvernance locale inclusive de la sécurité alimentaire et nutritionnelle, fondée sur le dialogue et l’initiative des acteurs locaux, ruraux comme urbains. Ils soulignent l’importance d’une approche territoriale de l’économie alimentaire afin d’en optimiser les potentiels en termes de croissance et d’emplois. L’économie alimentaire pèse au moins 260 milliards de dollars, soit 39 % du PIB régional et fait vivre 82 millions de personnes, soit 66 % des emplois directs. Les membres du Réseau invitent les États et leurs OIG, à investir dans la durée, dans des politiques volontaristes de développement et de renforcement des chaînes de valeur agro-alimentaires, en particulier les segments faibles ou manquants de la transformation agro-alimentaire et de la distribution. Ils insistent sur la nécessité de positionner l’économie alimentaire au cœur des stratégies nationales, régionales et internationales de création d’emplois, en particulier l’emploi des jeunes et des femmes ; y compris dans les initiatives de stabilisation et de développement du Sahel.

6- La deuxième évaluation de la Charte PREGEC est sur le point de livrer ses conclusions. Tout en soulignant l’importance de la revue externe, les membres du Réseau insistent sur la nécessité d’une meilleure prise en compte du genre et d’un renforcement des mécanismes de suivi-évaluation et d’interpellation. Ils se félicitent de l’état de mise en œuvre de la stratégie de communication du RPCA, notamment le prochain lancement de la plateforme d’information interactive sur les analyses du Cadre harmonisé, la cartographie des interventions et les bonnes pratiques de sécurité alimentaire, nutritionnelle et de résilience.

7- Les membres du RPCA saluent la pertinence de la mutuelle panafricaine de gestion des risques (African Risk Capacity – ARC) en tant qu’outil permettant aux États de faire face à certains chocs liés aux aléas climatiques. Ils insistent sur la nécessité d’assurer une meilleure cohérence et complémentarité de cet instrument avec ceux développés dans la région par le Réseau. À cet effet, ils encouragent le renforcement de la coopération entre l’ARC et le Réseau. Les membres du Réseau soulignent par ailleurs la nécessité d’engager la réflexion sur la recherche de synergies des systèmes d’alerte précoce, y compris celles relatives à la sécurité.

8- Cinq années après le lancement de l’Alliance globale pour la résilience (AGIR), des efforts d’investissement dans la mise en œuvre des « Priorités résilience pays » (PRP-AGIR) sont perceptibles. Par ailleurs, l’impulsion de l’Alliance a positivement influencé l’intégration de la dimension résilience dans la formulation de nouvelles politiques. Enfin, un travail de capitalisation de bonnes pratiques de résilience est en cours afin de faciliter l’apprentissage mutuel. Tout en saluant ces acquis, les parties prenantes insistent sur l’urgence d’accélérer la mise en place des instruments de suivi-évaluation de la table de résultats de l’Alliance.

9-Le 5e anniversaire d’AGIR intervient dans un contexte particulier de questionnements quant à la place réelle des enjeux alimentaires, nutritionnels et de résilience dans les priorités des États, de leurs OIG et de leurs partenaires. La cristallisation autour des défis migratoires et sécuritaires, ainsi que la multiplication d’initiatives non coordonnées et non alignées, constituent autant de risques pour la réalisation de l’ambition « Faim zéro » à l’horizon 2035 dont s’est dotée la région. Les parties prenantes de l’Alliance réaffirment l’urgence de replacer les enjeux alimentaires et nutritionnels et les enjeux d’emplois au cœur des agendas de développement. Ils rappellent à ce sujet que les problématiques alimentaires constituent un pan central des réponses aux défis sécuritaires et migratoires. Ils recommandent la désignation par la CEDEAO, l’UEMOA et le CILSS, d’un leader politique de haut rang « Champion de la cause alimentaire et nutritionnelle » afin d’assurer, avec le soutien du Président du CSAO et du Groupe des organisations de la société civile et du secteur privé, l’indispensable lobbying en faveur de cette cause. En ligne avec la déclaration de Milan en 2015, les membres du Réseau exhortent, une fois de plus, l’ensemble des parties prenantes à mieux coordonner leurs interventions et à les aligner sur les priorités de la région. À ce sujet, ils appellent les États et leurs OIG à assumer pleinement leurs missions régaliennes de garant de la coordination et de l’alignement à travers la mise en place de cadres appropriés de dialogue. Ce devoir de responsabilité passe également par la mise en place de mécanismes opérationnels de redevabilité des résultats pour assurer l’efficacité des nombreux politiques et programmes dont regorge la région.

10- Les membres du Réseau conviennent que la 34e réunion annuelle aura lieu les 3-5 décembre 2018 à Banjul, en Gambie.

Cotonou, le 6 décembre 2017

Les participants à la 33ème réunion annuelle du Rpca

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