Alors que la communauté internationale se prépare pour la COP23, qui démarrera en novembre prochain à Bonn en Allemagne, sous la présidence des îles Fiji, le Maroc continue d’assurer son rôle de président de la COP22. Si la ville d’Agadir a accueilli le sommet mondial Climate Chance, Rabat a été au cœur d’une série d’entretiens et de réunions informelles avec les chefs de délégations de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (Ccnucc), pour préparer la COP23 et le Climate Chance. Nos confrères de huffpostmaghreb.com sont allés à la rencontre de Brigitte Collet, ambassadrice française chargée des négociations sur le changement climatique, des énergies renouvelables et de la prévention des risques. Cheffe de la délégation française, celle qui définit son rôle comme consistant à « défendre et représenter la position de la France tout en étant à l’écoute de la position des autres parties », revient sur les thèmes phares de ces réunions et sur la collaboration franco-marocaine dans la lutte contre le réchauffement climatique.
Quels sont les thèmes phares qui ont été abordés à Rabat?
Nous étions dans un cadre multilatéral, avec une quarantaine de pays présents. Le Maroc assure la présidence jusqu’en novembre et est là pour animer les débats. Trois sujets étaient principalement à l’ordre du jour. Le premier est en rapport avec l’accord de Paris, signé par plus de 160 pays et entré en application à la veille de la COP22. Cet accord, pour être appliqué, a besoin d’un certain nombre de précisions et le processus doit être achevé d’ici 2018. Dans ce cadre, la réunion tenue à Rabat a été très utile. Le second sujet est le dialogue de facilitation qui aura lieu à l’occasion de la COP24, en Pologne. Cela consiste à voir notre trajectoire et à impulser un effort collectif plus déterminé. Les présidences marocaine et fidjienne ont expliqué comment cette rencontre peut s’organiser. À la COP23 en novembre, nous serons en mesure d’expliquer comment aura lieu ce dialogue. Tout cela peut avoir l’air procédurier, mais c’est fondamental. Il n’est pas facile de mettre d’accord près de 200 pays: il faut beaucoup d’écoute, de travail, de dialogue, et je trouve que nous avons bien avancé sur ce point. Le troisième sujet abordé est celui du financement de l’action climatique. Comment mobilise-t-on des financements? Là encore, l’échange fut riche. Cette thématique est particulièrement importante pour les pays en développement, et notamment pour les pays africains.
Quel rôle peut justement jouer l’Afrique dans cette lutte contre le réchauffement climatique?
L’Afrique a un rôle déterminant. Le continent est particulièrement affecté par le réchauffement climatique, mais il produit aussi peu de gaz à effet de serre. Il faut que le développement de l’Afrique soit propre et ne contribue pas au réchauffement climatique, et que ce continent ne commette pas les erreurs que l’on a faites. C’est pour cette raison que l’on se réjouit de voir que le continent se tourne vers les énergies renouvelables, notamment le Maroc, qui est un champion dans ce domaine. Mais d’autres pays africains ont besoin d’aide. Il y a l’initiative africaine des énergies renouvelables qui vise à ce que le développement de l’Afrique soit propre. Ce continent a vraiment son rôle à jouer, et c’est un point qui a été déterminant pendant les réunions. L’idée est de sauter une étape et d’éviter à l’Afrique la phase de destruction de l’environnement. L’état des connaissances fait que c’est à présent possible si on permet à l’Afrique d’avoir les technologies et les financements nécessaires, et c’est à cela que l’on doit travailler.
Particulièrement médiatisées, les COP souffrent-elles selon vous d’une baisse d’intérêt de l’opinion publique une fois terminées?
J’ai plutôt l’impression que la mobilisation est forte. L’initiative du Maroc d’organiser cette réunion est importante. Il y a d’ailleurs ce lundi, à Agadir, un forum de la société civile sur le climat. Je trouve que l’engouement est manifeste de la part des gouvernants et de la société civile. La mobilisation est là mais le coup de projecteur n’est pas permanent. Le travail de fond est là et la mobilisation aussi, nous sommes engagés dans un vrai mouvement de transition. On voit les investisseurs qui se tournent vers ces secteurs, dans le domaine de l’agriculture par exemple. Je pense ainsi au secteur agricole dans lequel le Maroc est très engagé notamment avec l’initiative triple A pour l’agriculture en Afrique. Concernant l’annonce de Trump de se retirer de l’accord de Paris, ce qu’il faut avoir à l’esprit est que les États-Unis ne se sont pas retirés et ne peuvent pas le faire avant le 4 novembre 2020. Ils ont d’ailleurs annoncé qu’ils voulaient se réengager. Donc la mobilisation est encore là, mais nous voulons continuer de faire en sorte qu’il y ait encore une action plus forte.
Quelles actions concrètes ont bénéficié d’une collaboration entre la France et Maroc?
Nous avons beaucoup travaillé dans le cadre des négociations. Quand le Maroc a pris le relais à la COP22, nous avons travaillé ensemble et nous avons continué durant la présidence marocaine. La France s’est d’ailleurs engagée dès le début dans l’initiative triple A. Nous avons lancé l’initiative 4 pour 1000 sur la restauration des terres agricoles, pour contribuer à la diminution des gaz, et le Maroc y participe aussi. Nous menons des collaborations concrètes, notamment pour des initiatives internationales.