Usage incontrôlé des pesticides : un danger pour l’environnement et les populations

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Il y a quelques années, les pesticides étaient surtout utilisés par les producteurs de coton. Cet usage qui était encadré par la Société des fibres et textile (Sofitex) tend de plus en plus à se vulgariser au Burkina Faso et échappe au contrôle des premiers acteurs ainsi que des structures spécialisées. Qu’est-ce qui explique cet état de fait ?, s’interroge lefaso.net. Quelle est l’ampleur du phénomène ? Quelles peuvent être les solutions pour l’éradiquer ?

Pays sahélien, avec un une saison pluvieuse de courte durée, le Burkina Faso est un pays essentiellement agricole. Sa population est jeune, à majorité rurale, et vit des productions agricoles. Le secteur agricole occupe une place très importante dans l’économie du Burkina Faso et constitue la principale source de subsistance et de revenu pour environ 85% à 95% de la population. Les superficies cultivées sont estimées à environ 3.6 millions et concernent essentiellement les spéculations telles que les céréales qui occupent environ 82% des espaces cultivés, ensuite viennent les cultures commerciales telles que l’arachide et le coton qui occupent environ 15%. Les produits de la maraicher-culture occupent moins de 1% des espaces exploités. L’agriculture joue un rôle important dans les recettes des produits d’exportation. En effet, la filière cotonnière seule, à l’instar de celle d’autres pays de la sous-région (Bénin, Mali et Tchad), procure près de 70% des recettes d’exportation du pays (Gomgnibou et al, 2009). Cependant, il faut noter que la production agricole au Burkina Faso est confrontée à un certain nombre de difficultés qui sont non seulement liées aux moyens de production qui sont généralement rudimentaires, mais aussi à une réduction du rendement de production due à l’appauvrissement des sols, et à l’action de certains vecteurs nuisibles (microorganismes, insectes, rongeurs et plantes). Ces difficultés ci-dessous citées sont exacerbées par des conditions climatiques précaires (forte pluviométrie ou poche de sécheresse). Pour atténuer les difficultés rencontrées par le secteur agricole, le gouvernement du Burkina Faso avec l’appui de ses partenaires techniques et financiers a mis en œuvre plusieurs programmes et politiques parmi lesquels, la lutte anti vectorielle et l’usage des pesticides y occupe une place importante.

L’usage des pesticides (herbicide et insecticides) initialement beaucoup plus réservé à certaines spéculations tel que le coton, a pris une certaine ampleur ces dernières années. On remarque qu’ils sont de plus en plus utilisés par les paysans dans leur système de production. L’usage systématique des herbicides est devenu un phénomène de mode chez certains paysans, et cela dans un souci de gain du temps de travail, et bien entendu d’argent. Il est vrai que pour plus de productivité, l’agriculture a besoin de se doter d’un certain nombre de moyens dont la lutte anti-vectorielle. Il est aussi vrai que les pesticides sont utiles dans une certaine mesure dans le contrôle des moustiques vecteurs de maladies telles que le paludisme, la dengue, etc… Cependant, leurs usages incontrôlés posent problème à différents niveaux : l’’engouement des producteurs pour les pesticides entraine l’inondation du marché de toute sorte de produits dangereux pour la santé humaine et animal. Car dit-on « on achète et revend ce qui marche » ; la qualité douteuse des produits commercialisés, car un bon nombre de distributeurs n’est pas agréé par la règlementation en vigueur en matière d’importation et de distribution de pesticides au Burkina Faso. A cela s’ajoute la qualité des étiquettes qui sont parfois absentes, ou lorsqu’elles existent sont illisibles du fait de la manipulation ou de l’exposition dans les conditions inappropriées. La mauvaise gestion des stocks de pesticides, et des déchets issus de l’usage des pesticides (contenant de pesticide, pesticide périmés, boue etc…) par les utilisateurs qui sont pour la plupart des analphabètes et ne disposant pas de logistique nécessaire à cette gestion. Au Burkina Faso, seule la société africaine de produits phytosanitaire dispose d’un système logistique de recyclage des pesticides obsolètes et de gestion de certains déchets de pesticide. A cette liste, s’ajoute la pollution de l’environnement entrainant la contamination des eaux de surface et des eaux souterraines (avec comme conséquence la diminution des ressources en eau exploitables pour l’alimentation en eau potable), la contamination des produits alimentaires issus des espaces traités ou des espaces environnants, la contamination de certaines herbacées ou de parties de plantes (écorce, feuilles, racines) utilisées par la médecine et la pharmacopée traditionnelle. La disparition progressive de certaines espèces d’herbes utiles dans l’alimentation des animaux, dans l’artisanat (fabrication de panier, fabrication d’enclos etc.) est aussi notée. A cela, il faut ajouter la disparition de certaines espèces animales telles que les crapauds, les grenouilles, les poissons comme ce fut le cas de l’intoxication des silures du marigot Houet en 2001 par des pesticides tels que le lindane et le thiram.

Enfin, les cas d’intoxication aigüe qui peuvent subvenir suite à l’usage des pesticides. En effet, les cas d’intoxication aigüe par les pesticides constituent un problème de santé publique au plan mondial, on enregistre plus de 300 000 décès par an, liés à l’intensification de l’usage des pesticides par l’agriculture. Au Burkina Faso, des cas d’intoxication aigüe, due à l’usage des pesticides ont été estimés à plus de 29% dans les deux grands centres hospitaliers universitaires, entre les années 2006 et 2007. Des cas d’intoxication d’animaux suite à leur passage sur des champs traités par des herbicides ont été constatés dans la zone du sud-ouest du Burkina Faso.

Moctar FICOU / VivAfrik

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