L’Afrique australe, troisième région productrice de céréales sur le continent africain après l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique de l’Est, fait face à une chute significative de sa production céréalière en 2024. Selon les dernières estimations de la FAO, publiées dans le rapport sur les Perspectives de cultures et la situation alimentaire mondiale le 3 novembre 2024, la production céréalière de cette région devrait se réduire de 8,2 millions de tonnes par rapport à la campagne précédente, atteignant 32,3 millions de tonnes pour la saison 2023/2024. Cette baisse de 20,2 % est principalement attribuée à la sécheresse sévère causée par le phénomène climatique El Niño.
Impact du phénomène El Niño sur la production céréalière en Afrique australe
Le phénomène El Niño, qui a déstabilisé les conditions climatiques de la région, a provoqué une sécheresse prolongée affectant quasiment tous les pays de l’Afrique australe. Cette situation a conduit à une baisse de la production céréalière dans la plupart des nations, avec des répercussions dramatiques sur les récoltes. La production céréalière pour la campagne 2023/2024 affiche une baisse de 16 % par rapport à la moyenne de ces cinq dernières années, qui était de 38,3 millions de tonnes.
En août 2024, six pays de la région – Botswana, Lesotho, Namibie, Malawi, Zambie et Zimbabwe – ont déjà déclaré l’état d’urgence en raison des effets dévastateurs de la sécheresse liée à El Niño. En particulier, le Zimbabwe est le pays le plus touché, avec une baisse de sa production céréalière proche de 60 % par rapport à l’année précédente. Cette situation de pénurie alimentaire a des implications graves pour la sécurité alimentaire régionale.
Madagascar, exception dans un contexte difficile
À l’exception notable de Madagascar, où la production céréalière a enregistré une augmentation de 14 % par rapport à l’année précédente, la récolte a chuté dans tous les autres pays de la région. Le rapport souligne que, bien que certaines zones de Madagascar aient connu des inondations localisées dues à des précipitations excessives dans le nord, les conditions climatiques ont été globalement plus favorables. En conséquence, la production de riz, denrée de base essentielle pour l’île, devrait être légèrement supérieure à la moyenne quinquennale en 2024.
Augmentation des importations de céréales en Afrique australe
Face à cette baisse de la production, la FAO prévoit une hausse significative des importations de maïs, la principale céréale de base de la région. Les importations de maïs devraient doubler en 2024, atteignant 3,8 millions de tonnes durant la campagne de commercialisation 2024/2025, afin de combler les déficits alimentaires.
Un autre impact notable de la sécheresse concerne l’Afrique du Sud, principal producteur africain de maïs. Le pays a autorisé pour la première fois des importations de maïs en provenance d’Argentine, une mesure qui marque un tournant puisque l’Afrique du Sud n’avait pas importé cette céréale depuis 2017. Plus récemment, le gouvernement sud-africain a annoncé son intention d’importer du maïs génétiquement modifié (OGM) en provenance des États-Unis pour renforcer l’approvisionnement en maïs de la région.
Perspectives pour la sécurité alimentaire et les mesures nécessaires
Les défis climatiques croissants et l’impact d’El Niño soulignent la nécessité de renforcer les stratégies de résilience agricole et de sécurité alimentaire en Afrique australe. La dépendance accrue aux importations de maïs, combinée à la baisse des récoltes locales, pourrait aggraver les vulnérabilités économiques et sociales dans la région, en particulier dans les pays déjà touchés par la pauvreté et l’insécurité alimentaire. Il est essentiel que les gouvernements de la région, ainsi que les partenaires internationaux, travaillent ensemble pour mettre en place des mesures de gestion de crise, améliorer les systèmes d’irrigation et promouvoir des pratiques agricoles résilientes face aux changements climatiques.
Moctar FICOU / VivAfrik