À partir de ce lundi 25 novembre 2024, la ville de Busan, en Corée du Sud, accueille une semaine de négociations cruciales sur la question de la pollution plastique. Ce processus a été lancé par les Nations Unies en 2022 en Uruguay et a vu plusieurs réunions de préparation avant cette phase finale. L’objectif de cette rencontre est d’élaborer un traité mondial visant à réduire la production et la pollution plastique. Cependant, comme pour les discussions récentes sur le climat à la COP29, ces négociations s’annoncent ardues et les résultats sont loin d’être garantis. En effet, les positions des 176 pays participants semblent profondément divergentes.
Des approches opposées pour réduire la production plastique
Les discussions s’ouvrent sur des désaccords majeurs concernant l’approche à adopter pour réduire la pollution plastique. Une large majorité des pays africains et européens soutient une approche ambitieuse : selon eux, la seule manière d’enrayer la pollution plastique est de limiter la production de plastique, qui continue d’augmenter de manière alarmante. Cette position avait d’ailleurs été adoptée par les États-Unis avant la présidence de Donald Trump, mais elle a été abandonnée depuis. Le pays, premier producteur mondial de déchets plastiques, semble désormais sceptique sur la faisabilité de cet objectif.
En revanche, un autre bloc de pays, comprenant des géants pétroliers du Golfe, certains producteurs africains comme l’Algérie, ainsi que la Russie, s’oppose fermement à toute restriction de la production de plastique. Pour ces nations, le plastique est un produit dérivé essentiel de l’industrie pétrochimique, un secteur déjà menacé par les politiques climatiques mondiales. Ces pays privilégient le recyclage comme solution à la pollution plastique, bien qu’il soit actuellement avéré que seulement 9 % des plastiques sont effectivement recyclés.
Un traité légalement contraignant : un point de friction majeur
Un autre point de tension majeur est le caractère contraignant du traité en préparation. Les pays signataires s’engageraient à respecter les termes de l’accord, sous peine de sanctions, une mesure qui pourrait renforcer les divisions entre les nations. Si certains pays voient dans ce cadre juridique une incitation à prendre des mesures concrètes, d’autres craignent des obligations trop lourdes à assumer.
Les positions africaines et les défis liés à la mise en œuvre
Le continent africain, dans son ensemble, soutient une réglementation stricte tout au long du cycle de vie du plastique, de sa production à son élimination. Cette position inclut également des règles pour les produits chimiques associés au plastique, et des besoins de financements clairs pour la mise en œuvre de ces mesures. Cependant, l’Afrique étant un faible producteur de plastique, la mise en œuvre de ces accords internationaux est particulièrement complexe pour les pays africains, qui manquent souvent de ressources financières et logistiques pour appliquer les normes imposées.
La Corée du Sud, un exemple de société du plastique
La question du plastique prend un sens particulier en Corée du Sud, où le pays génère près de 12 millions de tonnes de déchets plastiques chaque année. Le plastique envahit la vie quotidienne, à commencer par les emballages des produits de consommation courante. À Séoul, il n’est pas rare que même des bananes vendues à l’unité soient enveloppées dans une couche de plastique. Cette omniprésence du plastique dans la société sud-coréenne illustre les difficultés à modifier les habitudes de consommation.
Une habitante de Séoul, qui utilise fréquemment les services de livraison à domicile, confie : « J’avais décidé d’acheter moi-même en grande surface pour réduire les déchets, mais même là, tout est emballé dans du plastique. J’ai l’impression de ne pas pouvoir lutter contre cette situation. » Cette expérience quotidienne montre à quel point le plastique est enraciné dans la vie des citoyens sud-coréens.
Des initiatives locales limitées
En réponse à cette crise, certaines initiatives émergent au niveau local. Par exemple, une gérante de café essaie de limiter l’utilisation du plastique en faisant payer un supplément pour les gobelets à emporter. « J’encourage mes clients à venir avec leur thermos, mais malheureusement, ils n’y pensent pas souvent », explique-t-elle. Cependant, l’absence d’une législation forte en Corée du Sud empêche une véritable prise de conscience collective. Bien que le pays ait mis en place une loi visant à réduire l’usage des plastiques, celle-ci a été abrogée par le gouvernement en 2023, ce qui a relancé le débat sur la nécessité de réguler l’industrie du plastique de manière plus stricte.
Les déchets plastiques continuent d’augmenter chaque année. En 2021, par exemple, la Corée du Sud a jeté 12 000 tonnes de plastiques, soit une augmentation de près de 50 % par rapport à 2017. Ce constat souligne l’urgence d’une action internationale ambitieuse pour faire face à la pollution plastique, à l’heure où la communauté mondiale tente de s’accorder sur un traité contraignant.
Moctar FICOU / VivAfrik